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Quand Anténor Firmin détruisait l’anthropologie raciste de Gobineau

 
L’extrait du chapitre XVII de l’ouvrage indispensable, plaidoirie implacable et réponse cinglante à l’autisme savant d’une ère égarée, De l’Egalité des races humaines (1885) est exemplaire des moyens de lutte contre les monstruosités idéologiques, po


29/01/2007
Les 18ème et 19ème siècles européens sont généralement considérés par les commentateurs érudits comme ceux des Lumières des grandes idées, des progrès colossaux de l’universalisme. Pourtant, en pleine période négrière, le crime le plus grave contre l’humanité commis par la civilisation chrétienne sur les Africains, les peuples qui s’octroient d’autorité le monopole de LA civilisation, théorisent avec forte audience sur le négatif de leur grande geste, l’infériorité des cultures, des humanités inabouties des contées lointaines, extra-européennes. La thèse de l’Inégalité des races est un lieu commun que les scientifiques appuient, à coup d’anthropologie physique, Gobineau et son célèbre ouvrage Essai sur l’Inégalité des races humaines [1855] est porté au pinacle.


S’inscrivant dans la lignée des grands résistants africains et descendants d’Afrique, un homme d’exception, haïtien, intellectuel et militant politique, précurseurs du panafricanisme, seul contre tous, Anténor Firmin allait donner la réplique à une opinion acquise à l’idée que lui-même, comme les sujets de la thèse qu’il défendait, étaient des sous-hommes, admis par dérogation à la table des races à sapiens. La force de caractère, de conviction et le courage politique de cet érudit défiant les vérités de son temps imposent le respect et surtout devraient servir de modèle et de référence solide dans l’édification de mentalités, d’identités, de projets allant de l’estime de soi, aux engagements collectifs pour les causes nègres, libératrices, humaines.

L’extrait du chapitre XVII de l’ouvrage indispensable, plaidoirie implacable et réponse cinglante à l’autisme savant d’une ère égarée, De l’Egalité des races humaines (1885) est exemplaire des moyens de lutte contre les monstruosités idéologiques, pour le rétablissement des bases d’une réelle rencontre de l’humain ramené à sa juste et égale valeur, par delà les contingences historiques et cycles de progrès et de régression. Il alerte aussi sur la permanence des répliques d’élites nègres acculées ou accusées solidaires de leurs semblables de races -cultures, origines, phénotypes- dans l’histoire, et sur la particularité des années 2000 : l’absence d’idées novatrices, d’initiatives à contenu, d’idéaux défendus avec grandeur, exigence et excellence. Un signal d’alarme sérieux, alors que n‘importe quel inculte laborantin, auteur d’un chiffon de papier, a libre cours pour déverser haine, racisme, et inepties sur les Négrologies, les Traites négrières, l’Outre-Mer assistée, les polygamies… Sans réponses appropriées sinon approbations et félicitations des Insultés, rapatriement des .cendres des colons en Afrique, ouverture des colonnes des médias de Noirs à ceux qui les tiennent aujourd’hui encore en infériorité, et qui le disent.


Rôle de la race noire dans l’histoire de la civilisation
Et le génie m’indiquant du doigt les objets : «Ces monceaux, me dit-il, que tu aperçois dans l’aride et longue vallée que sillonne le Nil, sont les squelettes des villes opulentes dont s’enorgueillissait l’ancienne Ethiopie; voilà cette Thèbes aux cent palais, métropole première des sciences et des arts, berceau mystérieux de tant d’opinions qui régissent encore les peuples à leur insu». (Volney)

I. Ethiopie, Egypte et Haïti

Pour répondre à ceux qui refusent à la race éthiopique toute part active dans le développement historique de notre espèce, ne suffit-il pas de citer l’existence des anciens Egyptiens ? On a pu soutenir la thèse curieuse de l’infériorité radicale des peuples noirs, tout le temps qu’une science de faux aloi et d’une complaisance coupable a maintenu l’opinion que les Rétous étaient de race blanche; mais aujourd’hui que la critique historique, parvenue à son plus haut degré d’élaboration, met tous les esprits perspicaces et sincères à même de rétablir la vérité sur ce point d’une importance capitale, est-il possible de fermer les yeux à la lumière et de continuer la propagation de la même doctrine? Rien ne serait plus malaisé pour les partisans de la théorie de l’inégalité des races humaines. En effet, les anciens riverains du Nil ayant été reconnus de race noire, comme je me suis évertué pour l’établir, avec surabondance de preuves, voyons ce que l’humanité doit à cette race.

Une longue énumération n’est aucunement nécessaire. Pour ce qui a trait aux conquêtes matérielles réalisées sur notre globe, nul de ceux qui ont étudié l’archéologie et les antiquités égyptiennes n’ignore la grande part d’initiative que ce peuple industrieux a eue dans les tous les genres de travaux. Les différentes sortes de fabrications manuelles dont la connaissance a été de la plus grande utilité pour le développement des sociétés humaines ont été généralement inventées en Egypte ou en Ethiopie. L’on y découvre les traces de tous les métiers, de toutes les professions. Jamais le génie des constructions n’a été porté plus loin ; jamais avec des moyens aussi élémentaires on n’a tiré des effets aussi magnifiques dans le domaine de l’art. Les monuments de l’Egypte semblent braver le temps pour immortaliser le souvenir de ces populations noires vraiment remarquables par leurs conceptions artistiques Là, l’imagination, planant dans un océan de lumière, a enfanté tout ce qu’on a vu de plus splendide, de plus grandiose dans le monde. Il est bien établi qu’aucune école sculpturale ou architectonique.

Mais en dehors de l’antique race éthiopico-égyptienne, ne peut-on point présenter une nation noire, grande ou petite, ayant par ses actions influé directement sur l’évolution sociale des peuples civilisés de l’Europe et de l’Amérique ?

Sans vouloir céder à aucune inspiration de patriotisme excessif, il faut que je revienne, encore une fois, sur la race noire d’Haïti. Il est intéressant de constater combien ce petit peuple, composé de fils d’Africains, a influé sur l’histoire générale du monde, depuis son indépendance. A peine une dizaine d’années après 1804, Haïti eut à jouer un rôle des plus remarquables dans l’histoire moderne. Peut-être des esprits d’une philosophie insuffisante ne sentiront pas toute l’importance de son action. Ceux-là s’arrêtent à la surface des choses et ne poursuivent jamais l’étude des faits, au point de saisir leur enchaînement et de voir où ils aboutissent. Mais quel penseur ne sait comment les petites causes, ou celles qui semblent telles, amènent de grands effets, dans la succession des évènements politiques et internationaux, où se déroule la destinée des nations et des institutions qui les régissent ! Une parole éloquente, une action généreuses et noble, n’ont-elles pas souvent plus d’importance sur l’existence des peuples que la perte ou le gain des plus grandes batailles ? C’est à ce point de vue moral qu’il faut se placer pour juger de la haute influence qu’a exercée la conduite du peuple haïtien dans les évènements que nous allons considérer.


L’illustre Bolivar, libérateur et fondateur de cinq républiques de l’Amérique du Sud, avait failli dans la grande œuvre entreprise en 1811, à la suite de Miranda, dans le dessein de secouer la domination de l’Espagne et de rendre indépendantes d’immenses contrées dont s’enorgueillissait la couronne du roi catholique. Il se rendit, dénué de toutes ressources, à la Jamaïque où il implora en vain le secours de l’Angleterre, représentée par le gouverneur de l’Île. Désespéré, à bout de moyens, il résolut de se diriger en Haïti et de faire appel à la générosité de la République noire, afin d’en tirer les secours nécessaires pour reprendre l’œuvre de libération qu’il avait tentée avec une vigueur remarquable, mais qui avait finalement périclité entre ses mains. Jamais l’heure n’avait été plus solennelle pour un homme, et cet homme représentait la destinée de toute l’Amérique Sud ! Pouvait-il s’attendre à un succès ? Lorsque l’Anglais, qui avait tous les intérêts, à voir ruiner la puissance coloniale de l’Espagne, s’était montré indifférent, pouvait-il compter qu’une nation naissante, faible, au territoire microscopique, veillant encore avec inquiétude sur son indépendance insuffisamment reconnue, se risquerait, dans une aventure aussi périlleuse que celle qu’il allait tenter ? Il vint peut-être avec le doute dans l’esprit ; mais Pétion qui gouvernait la partie occidentale d’Haïti, l’accueillit avec une parfaite bienveillance.

En prenant des précautions qu’un sentiment de légitime prudence devait lui dicter, à ce moment délicat de notre existence nationale, le gouvernement de Port-au-Prince mit à la disposition du héros de Boyaca et de Carabobo tous les éléments qui lui faisaient [dont il avait] besoin. Et Bolivar manquait de tout ! Hommes, armes et argent lui furent généreusement donnés. Pétion ne voulant pas agir ostensiblement, de crainte de se compromettre avec le gouvernement espagnol, il fut convenu que les hommes s’embarqueraient furtivement, comme des volontaires, et qu’il ne serait jamais fait mention d’Haïti dans aucun acte officiel de Venezuela.
Bolivar partit, muni de ces ressources, confiant dans son génie et son grand courage. Les aspirations générales de ses compatriotes conspiraient en faveur de son entreprise ; car on n’attendait pour se manifester efficacement qu’un coup hardi, un acte d’audacieuse résolution. Il opéra donc héroïquement son débarquement sur les côtes fermes de Venezuela. Après avoir battu le général Morillo qui voulut lui barrer le passage, il marcha, de triomphe en triomphe, jusqu’à la complète expulsion des troupes espagnoles et à la proclamation définitive de l’indépendance vénézuélienne qui fut solennellement célébrée à Caracas.
Mais là ne s’arrêta pas l’action de l’illustre Vénézuélien. Il continua la campagne avec une vigueur et une activité infatigables. Par la célèbre victoire de Boyaca, il conquit l’indépendance de la Nouvelle-Grenade et la réunit au Venezuela pour former la république de Colombie, digne hommage rendu à la mémoire de l’immortel Colomb. Incapable de se reposer dans la contemplation de ses succès, il ne perdit pas haleine avant que son entreprise fût menée à terme. Il donna la main aux habitants du Haut-Pérou qui, à l’aide des Colombiens commandés par le général Sucre, défirent les Espagnols dans une bataille décisive livrée aux environs d’Ayacucho, et fit proclamer la république de Bolivie. Par la victoire de Junin qu’il remporta sur les armées espagnoles, l’indépendance du Pérou fut complètement raffermie et la puissance coloniale de l’Espagne à jamais ruinée !

L’influence de tous ces faits sur le régime politique de la Péninsule est incontestable. Après avoir déployé une énergie indomptable pour repousser l’avènement d’un prince français au trône des rois d’Espagne et combattre les prétentions de souveraineté que Napoléon Ier affichait sur l’Europe entière, en remplaçant toutes les anciennes dynasties par les membres de sa famille, les Cortès montrèrent que le peuple espagnol, tout en résistant à la violence, n’avait pas moins compris la grandeur des idées qui avaient surgi avec la Révolution 1789. La constitution qu’ils élaborèrent, en 1812, en est la preuve évidente. Mais advint le retour des Bourbons. Le colosse impérial, étant renversé par la coalition de l’Europe monarchique et disparu de la scène, Ferdinand VII voulut monter sur le trône de ses pères tel qu’il devait lui échoir par droit de naissance, sans aucun amoindrissement de prérogatives royales. Comme les Bourbons de France, ceux d’Espagne ne comptaient pour rien le temps écoulé entre leurs prédécesseurs et la restauration monarchique ils n’avaient rien appris ni rien oublié !

Sans le bouleversement des colonies de l’Amérique du Sud qui s’émancipèrent les unes après les autres du joug de l’Espagne, la monarchie pourrait être assez puissante pour étouffer toutes les protestations de la liberté; mais affaiblie par les efforts qu’elle dut faire pour éviter la désagrégation de l’empire qui s’en allait en lambeaux, elle ne put rien contre l’opposition, de plus en plus hardie et exigeante. L’appui qu’elle réclama de la France, pour le rétablissement de ses prérogatives, en 1823, n’eut qu’un résultat extérieur et temporaire. Ce résultat forcé devait tourner plus tard contre le principe même qu’on voulait sauver, en ruinant complètement le peu de popularité dont jouissait en France le drapeau légitimiste !


Qu’on suive avec quelque attention toutes ces péripéties de l’histoire européenne, à l’époque où ces divers évènements se déroulaient ; on sera étonné d’y voir à quel degré tous ces faits s’enchaînent. Les contrecoups des actions héroïques que Bolivar accomplissait, dans les gorges ombreuses ou sur les plateaux enflammés des Cordillères, ricochaient sur les institutions séculaires de l’Europe ; ils secondaient le courant des idées révolutionnaires qui, comme une avalanche, ébranlaient de plus en plus les rouages usés de l’ancien régime. Par toute l’Amérique, c’est le nom de la République qui prédominait. On dirait que le Nouveau Monde sentait la sève de l’avenir bouillonner dans les idées de liberté et d’égalité ! Ne sont- elles pas, en effet, indispensables au développement des jeunes générations ? En lisant les Mémoires du prince de Metternich, on voit que sa perspicacité d’homme d’Etat ne s’était pas complètement méprise sur l’importance de ces crises que subissait toute l’Amérique du Sud, adoptant l’idéal du pavillon étoilé ; mais par son bon sens et sa grande pénétration, il sentait qu’il n’y avait rien à faire de ce côté. Le câble était coupé !

Sans doute, il y a une époque précise où les grands événements politiques se réalisent fatalement, qu’on s’y oppose ou non. L’esprit humain, ayant progressé, accomplit souvent un travail interne qui remue les nations, les agite et les pousse à des commotions inéluctables, d’où sort une ère nouvelle avec des institutions plus conformes au mode dévolution réclamé par les temps. Mais ces événements ont leurs facteurs, comme toutes les forces produites ou le produire. Pour en considérer la nature, il ne faut rien négliger. Eh bien, qu’on prenne en considération l’influence que Bolivar a exercée directement sur l’histoire d’une partie considérable du Nouveau Monde et indirectement sur le mouvement de la politique européenne, est-il possible de ne pas admettre en même temps que l’action de la République haïtienne a moralement et matériellement déterminé toute une série de faits remarquables, en favorisant l’entreprise que devait réaliser le génie du grand Vénézuélien?


A part cet exemple, qui est un des plus beaux titres de la république noire à l’estime et à l’admiration du monde entier, on peut affirmer que la proclamation de l’indépendance d’Haïti a positivement influé sur le sort de toute la race éthiopienne, vivant hors de l’Afrique. Du même coup, elle a changé le régime économique et moral de toutes les puissances européennes possédant des colonies ; sa réalisation a aussi pesé sur l’économie intérieure de toutes les nations américaines entretenant le système de l’esclavage.

Dès la fin du XVIIIe siècle, un mouvement favorable à l’abolition de la traite s’était manifesté. Wilberforce en Angleterre et l’abbé Grégoire en France furent les modèles de ces philanthropes qui se laissèrent inspirer par un sentiment supérieur de justice et d’humanité, en présence des horreurs dont le commerce des négriers donnait l’exemple. Raynal avait prédit dans un langage prophétique la fin de ce régime barbare. il avait prévu l’avènement d’un Noir de génie qui détruirait l’édifice colonial et délivrerait sa race de l’opprobre et de l’avilissement où elle était plongée. Mais ce n’était que d’éloquentes paroles qui, répandues aux quatre coins de la terre, jetaient l’émotion dans les âmes élevées, sans parvenir à convaincre ceux dont l’incrédulité égalait l’injustice, le dédain et l’avidité.  


Quand on eut vu les Noirs de Saint-Domingue, livrés à leurs propres ressources, réaliser ces prophéties que personne n’avait voulu prendre au sérieux, on se mit à réfléchir. Ceux dont la foi ne demandait que des faits pour se raffermir et prendre la force d’une conviction, persévèrent dans leurs principes ; ceux en qui la rapacité et l’orgueil étouffaient toute clairvoyance et toute équité furent ébranlées dans leur folle sécurité. L’inquiétude ou l’espérance agitait les uns ou fortifiait les autres, selon leurs inclinations.
La conduite des Noirs haïtiens apportait, en effet, le plus complet démenti à la théorie qui faisait du Nigritien un être incapable de toute action grande et noble, incapable surtout de résister aux hommes de la race blanche. Les plus beaux faits d’armes enregistrés dans les fastes de la guerre de l’indépendance avaient prouvé le courage et l’énergie de nos pères :
cependant les incrédules doutaient encore. Ils se disaient que l’homme de race éthiopienne, enhardi par le premier coup de feu, avait bien pu se battre et prendre un plaisir acoquinant [vx.] à culbuter les Européens de l’Ile, tel que des enfants qui s’exercent à un jeu nouveau et, par cela même, infiniment attrayant. Qui pouvait mettre en doute que, la guerre une fois finie, les anciens esclaves, abandonnés à eux-mêmes, ne fussent effrayés de leur audace et ne fussent venus offrir leurs mains aux menottes de leurs anciens contremaîtres ? Ces êtres inférieurs pouvaient-ils maintenir durant deux mois un ordre de choses où le blanc n’eût aucune action, aucune autorité ? Non, il n’y eut personne qui ne se moquât de l’idée de Dessalines et de ses compagnons, voulant créer une partie et se gouverner indépendamment de tout contrôle étranger. Qu’on ne pense pas qu’il s’agisse ici de simples suppositions ! Ce sont là des pensées qui ont été imprimées dans des mémoires savants ; elles ont été généralement partagées, en, Europe, dans les premiers temps de l’indépendance d’Haïti. Aussi les hommes d’Etat français, confiants dans ces absurdes théories qui ne prennent leur source que dans la croyance à l’inégalité des races humaines, ne désespèrent-ils pas de ressaisir l’ancienne colonie dont les revenus étaient une si claire ressource pour la France. En 1814, sous le gouvernement provisoire de Louis XVIII, des démarches furent positivement faites, tant auprès de Christophe, dans le Nord, qu’auprès de Pétion, dans l’ouest, pour leur proposer de remettre l’Ile sous la domination française. Il leur fut offert la garantie d’une haute situation pécuniaire et le plus haut grade militaire qu’on pouvait avoir dans l’armée du roi. Ces propositions furent repoussées avec une indignation d’autant plus respectable et imposante que la contenance des deux chefs fut aussi calme que digne et ferme. Les démarches furent dirigées sous l’inspiration et d’après les conseils de Malouet. Ces faits ne sont-ils pas de nature à augmenter considérablement les droits de la petite république au respect universel ?  

Oui, dans ces temps difficiles, Haïti avait lait preuve d’un tel bon sens, d’une telle intelligence dans ses actes politiques, que tous les hommes de cœur, émerveillés d’un si bel exemple, ne purent s’empêcher de revenir sur les sottes préventions qu’on avait toujours nourries contre les aptitudes morales et intellectuelles des noirs. « Dans une seule Antille encore, dit Bory de Saint-Vincent, faisant allusion à Haïti, on voit de ces hommes réputés inférieurs par l’intellect, donner plus de preuves de raison qu’il n’en existe dans toute la péninsule Ibérique et l’Italie ensemble » (Bory de Saint Vincent, Ioco citato, t. II. P. 63).


L’expérience la meilleure, l’observation la plus précise était donc faite d’une manière irréfutable. Les hommes d’État les plus intelligents, réunis aux philanthropes européens, comprirent que l’esclavage des Noirs était à jamais condamné ; car l’excuse spécieuse qu’on lui avait longtemps trouvée, en décrétant l’incapacité native de l’homme éthiopique à se conduire comme personne libre, recevait par l’existence de la république noire la plus accablante protestation. Macaulay, en Angleterre, et le duc de Broglie, en France, se mirent à la tête d’une nouvelle ligue d’anti-esclavagistes. En 1831, un homme de couleur, libre, occupant une position sociale à la Jamaïque, Richard Hill, fut chargé de visiter Haïti et faire un rapport sur ses impressions. Par lui, les progrès rapides réalisés par les fils des Africains furent constatés avec bonheur, quoique avec impartialité. Déjà quelques années auparavant, au dire de Malo (Malo, Histoire d’Haïti depuis sa découverte jusqu’à 1824), John Owen, ministre protestant, qui y passa vers 1820, avait su remarquer le développement subit de la société et de l’administration. Les faits portèrent leurs fruits. En 1833, l’Angleterre résolut d’abolir l’esclavage dans toutes ses colonies ; en 1848, sous l’impulsion du vaillant et généreux Schoelcher, le Gouvernement provisoire décréta la même mesure qui fut inscrite dans la constitution même de la France.
Par les citations que nous avons déjà faites du discours de Wendell Phillips, on peut se convaincre facilement de quelle importance a été l’exemple d’Haïti en faveur de la cause de l’abolition de l’esclavage aux Etats-Unis d’Amérique. Cette vaste contrée est destinée malgré toutes les apparences contraires, à porter le dernier coup à la théorie de l’inégalité des races. Dès maintenant, en effet, les Noirs de la grande République fédérale ne commencent-ils pas à jouer le rôle le plus accentué dans la politique des divers Etats de l’Union américaine ? N’est-il pas fort possible, avant cent ans, de voir un homme d’origine éthiopique appelé à présider le gouvernement de Washington et conduire les affaires du pays le plus progressiste de la terre, pays qui doit infailliblement en devenir le plus riche, le plus puissant, par le développement du travail agricole et industriel ? Certes, ce ne sont point ici de ces conceptions qui restent éternellement à l’état d’utopie. On n’a qu’à étudier l’importance chaque jour grandissante des Noirs dans les affaires américaines pour que tous les doutes disparaissent. Encore faut-il se rappeler que l’abolition de l’esclavage ne date que de vingt ans aux Etats-Unis !

Sans pouvoir être accusé d’aucune exagération dans la soutenance de ma thèse, je puis donc certifier, en dépit de toutes les assertions contradictoires, que la race noire possède une histoire aussi positive, aussi importante que celle de toutes les autres races. Arriérée et longtemps contestée par la légende mensongère qui faisait des anciens Egyptiens un peuple de race blanche, cette histoire reparaît de nouveau, avec le commencement de ce siècle. Elle est pleine de faits et d’enseignements ; elle est absolument intéressante à étudier à travers les résultats significatifs qu’elle signale dans chacune de ses pages.


Lire : Firmin A., De l’égalité des races humaines (1885), Ed. L’Harmattan, Paris, 2003
Chapitre XVII Rôle de la race noire dans l´histoire de la civilisation

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