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Siméon Kuissu : L´UPC a peut-être accompli sa mission historique
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Depuis des années, l`Upc n`a plus les moyens de ses ambitions. Les différentes excroissances, dont certaines ont prétendu être les seules à détenir la légalité, ont montré leur incapacité, voire dans certains cas leur trahison.
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Sur la scène politique camerounaise, il occupe une position à la fois historiquement importante et pratiquement effacée. Le Dr Kuissu (il est pneumologue) est en effet l´unique ancien secrétaire général de l´Upc en vie et qui ne soit plus en fonction. Entretien mené par Jean Baptiste Ketchateng
Dans les trois factions qui réclament, de manière légitime ou totalement démagogique, l´héritage d´Um Nyobè et de ses compagnons de lutte, les secrétaires généraux sont en place et ne connaissent point de prédécesseurs, ou même de challengers. C´est dire si l´expérience politique de ce Camerounais né à Nkongsamba en 1944 et qui a rejoint le parti nationaliste en 1975 au terme de ses études en France, peut servir à scruter la situation actuelle du Cameroun et celle de l´Upc qu´il juge bloquées par l´absence de leadership. Un mot qui peut sembler étrange dans la bouche de ce militant de la gauche camerounaise au sujet de l´Upc qu´il a dirigée de décembre 1991 à avril 1992, avant de démissionner de ses fonctions, au tournant crucial de la sortie de clandestinité du plus vieux parti politique camerounais. Mais l´homme qui a tenté de rassembler l´opposition camerounaise dans son One Challenger en 2004 afin d´aller à la présidentielle avec un candidat n´est-il pas réputé pour être un pragmatique ?
Comment le vieux militant politique que vous êtes a-t-il vécu la crise sociale et politique de février dernier au Cameroun ? La première impression que j´ai eue c´était la surprise. Bien que je me considère comme un observateur, je ne pensais pas qu´un tel événement pouvait se produire. Certes, les pré requis d´une telle situation étaient déjà en place : la cherté de la vie, qui est la donnée principale ; puis la donne politique qui est que le président de la République veut faire modifier non pas la Constitution, mais l´article 6 de cette loi qui limite les mandats présidentiels. Le président dit que des clameurs montent du pays pour lui demander de le faire, mais s´il tendait un peu l´oreille, il entendrait aussi ceux qui disent le contraire. Mais cela n´est rien par rapport à ce qui nous menace.
Une organisation politique qui comme l´Upc depuis 60 ans cherche à diriger les affaires du Cameroun semble n´avoir pas prévu et agi en fonction de cette révolte… Depuis des années, l´Upc n´a plus les moyens de ses ambitions. Les différentes excroissances de l´Upc qui sont apparues à partir de 1990, dont certaines ont prétendu être les seules à détenir la légalité, ont montré leur incapacité, voire dans certains cas leur trahison. Mais l´Upc aujourd´hui, c´est l´Upc des fidèles. Cette Upc-là, effectivement, ne s´est pas beaucoup faite entendre. L´un de mes désaccords avec cette Upc, c´est justement la marginalisation de ses dirigeants par rapport à la société, le décalage entre leurs analyses et la réalité. Ça ne m´a pas du tout étonné que l´Upc soit donc aussi absente que les autres partis politiques au cours de ces importants événements.
La question demeure sous divers aspects cependant, puisque l´Upc s´est justement bâtie sur les luttes sociales. Comment comprendre que ses dysfonctionnements internes fassent qu´elle passe à côté d´une lutte de l´importance de celle que nous venons de vivre ? Pour agir, il faut d´abord exister. Exister veut dire : être un parti politique réel, avoir une ligne politique, une direction et des moyens d´action. On peut certes analyser et ergoter des heures ou des années durant sur les raisons de cet état des choses, mais il y a des raisons objectives qui l´expliquent.
L´Upc ne figurait pas parmi les organisations accusées d´avoir planifié et mis en œuvre cette insurrection populaire. Mais à votre avis, était-ce organisé ou spontané ? N´étant pas dans le secret des dieux, je ne peux juger que par ma propre observation qui est que cette insurrection n´était pas téléguidée. Quand le président de la République parle des apprentis sorciers, j´ai deux interprétations : soit le sorcier c´est lui-même, il a tout manigancé pour en tirer profit ; ou bien il connaît ces apprentis sorciers et dès lors il faut qu´il nous dise qui ils sont. Personnellement, je ne vois pas qui c´est. Mais la population veut savoir…
Vous ne jugez donc qu´à première vue? A première vue en effet, il y a une chronologie qui peut permettre de comprendre. Il y a eu l´appel à la grève des transporteurs. Le jour d´avant, il y a eu un meeting convoqué par un parti politique à Douala qui s´est révélé être un pétard mouillé. Par contre la grève a pris une ampleur au-delà de ce que ses organisateurs prévoyaient ? Les syndicalistes l´ont reconnu, ils ne contrôlaient plus le mouvement. Pendant ce temps, les partis politiques étaient aphones. Alors, qui d´autre aurait pu organiser et contrôler le mouvement ?
Vous ne pensez pas que le parti qui semble avoir occupé la place de l´Upc dans les couches populaires de la société camerounaise ait pu le faire sans y paraître? Je ne crois pas à cette hypothèse. Le Sdf, pour ne pas le nommer, ne me semble pas aujourd´hui capable de cela. L´époque où les populations camerounaises croyaient en son leader me semble révolue.
Certains ont également prétendu que des barons du régime en place aient pu manigancer la colère populaire pour prendre le pouvoir sans risques ? C´est une hypothèse. Mais j´en appelle au chef de l´Etat pour qu´il éclaircisse la situation. Nous voulons savoir. Les apprentis sorciers on voudrait bien les connaître.
Bien qu´elle n´ait pas pu se placer aux côtés de l´insurrection populaire, l´Upc n´a pas encore dit qu´elle renonçait au moyen de l´action des masses vers le pouvoir pour réaliser ses ambitions. Peut-on dès lors comprendre que c´est la reconstruction du mouvement qui l´a empêché d´agir cette fois-ci, ou bien est-elle comme le prétendent certains, complètement larguée ? Elle semble longue cette reconstruction… Depuis le temps qu´on en parle…Cela fait au moins quatre ans et bien avant on en parlait déjà. Je ne sais pas cependant s´il faut employer le mot largué. Ce qui manque à l´Upc, de mon point de vue, puisque les militants upécistes sont présents, la volonté de se battre existe, c´est une direction, un leadership. C´est pareil pour l´ensemble de l´opposition camerounaise. Au sortir de la clandestinité en effet [1990, Ndlr], nous étions en capacité de maîtriser le processus. Si on ne l´a pas fait, c´est parce qu´il ne s´est pas dégagé un leadership pour diverses raisons. Certains ont dit que le pouvoir a acheté des upécistes, d´autres ont évoqué la répression, mais beaucoup d´autres partis au Cameroun et ailleurs ont subi l´oppression, la corruption, mais ils ont tenu debout parce qu´il y avait un leadership. Et tant qu´il n´y aura pas de leadership, rien ne changera au Cameroun.
Depuis la démission de Woungly Massaga du secrétariat général de l´Upc en 1990, votre parti cherche donc un leader ? Vous posez une bonne question : l´Upc cherche-t-elle un leader ? Moi, je constate qu´elle n´en a pas. Mais le problème de leadership de l´Upc est bien antérieur à Woungly Massaga. Il y a eu pendant des années des querelles de chef. Plusieurs personnes se proclamaient chefs. On ne connaît aucune armée qui peut gagner la guerre avec trente-six chefs. Comme disent si bien les militaires, quand il y a une mission, il faut un chef et des moyens.
Il y a quand même une direction de l´Upc en ce moment… Il y a aussi un gouvernement au Cameroun. Il y a une direction, un pouvoir. Mais on voit bien les résultats.
Soyons plus précis, parlons d´une direction légitime. Légitime. Je ne suis même pas sûr qu´elle soit légitime. Je n´ai pas été au dernier congrès mais la façon dont se sont passées les élections permet de douter de la légitimité de la direction de l´Upc des fidèles. Je pèse mes mots.
Vous ne militez donc plus ? Ah si ! Je milite. J´ai démissionné de la direction de l´Upc mais je suis toujours upéciste. C´est une position très commode que beaucoup de vos camarades en rupture de militantisme adoptent. Je suis militant, je ne suis plus dirigeant et je travaille. Je peux vous en apporter les preuves. J´ai écrit à la direction de l´Upc plusieurs fois pour faire des propositions. Je ne suis pas inactif.
Parlons-en des propositions. Pour un parti qui manque de leadership alors que l´ouvrage politique qu´est le Cameroun l´appelle, que faut-il faire ? Il faut le demander aux upécistes. Il faut commencer par les regrouper pour leur demander ce qu´ils veulent. C´est ce que je propose. Nous avons en effet une chance historique - mais c´est aussi peut-être un malheur- c´est que nous avons eu 17 ans au moins pour nous observer les uns les autres. Si aujourd´hui on est upéciste et qui plus est dirigeant upéciste, on est en capacité de dire qui est vraiment upéciste et qui ne l´est pas. En 1991 en effet, l´un des grands malheurs que nous avions, c´est qu´on s´excluait mutuellement. Le groupe à Augustin Frédérick Kodock nous disait : vous n´êtes pas upécistes. Nous le leur disions en retour. On s´excluait mutuellement, personne ne reconnaissait à l´autre la qualité d´upéciste. Ce combat n´aurait plus lieu d´être aujourd´hui où beaucoup ont été au gouvernement du Rdpc. Parmi ceux qui n´étaient pas au pouvoir, on a pu observer ceux qui font semblant d´être avec nous. Si les dirigeants de l´Upc ne le font pas aujourd´hui, et organisent plutôt des manœuvres souterraines pour convoquer un congrès groupusculaire avec des gens qui vont parler le même langage qu´eux, alors ce sera une deuxième forfaiture après celle de 1991. Ce qu´il faut donc faire aujourd´hui, c´est convoquer un grand congrès de tous les upécistes, débattre de tous les problèmes et en tirer les conclusions.
Faut-il comprendre que les militants actuels ne se reconnaissent pas dans la direction ? Pourquoi ne font-ils pas spontanément le mouvement vers leurs chefs avec leurs désirs politiques en mains ? Il y en a beaucoup qui ont fait la démarche que j´ai faite. Je ne vais pas citer des noms, au risque d´en oublier et de créer des problèmes, mais nous sommes nombreux à travailler à cela, à aller vers la direction pour qu´elle regroupe tout le monde upéciste.
Quelle est la réponse qu´on vous y a donnée ? Je ne sais pas ce qui a été dit aux autres. Mais celle qui m´a été donnée à moi, je peux la résumer en un mot : va militer dans un comité de base et reviens nous voir. C´est ce que j´ai ressenti. J´ai eu la sensation que la direction me demandait à quel titre je m´exprime.
Si vous ne vous exécutez pas, c´est donc dire que tout mouvement est bloqué à l´Upc ? Je ne peux pas encore le dire parce que c´est un combat politique. Il y a plusieurs militants upécistes qui sont à l´œuvre pour que ça se passe différemment. Mais si cela se passe dans un congrès groupusculaire, on aura signé la mort de l´Upc.
On peut aussi, avant un tel congrès, poser la question de savoir qui est upéciste ? J´ai répondu depuis 1990 : est upéciste celui qui dit qu´il l´est. Ça peut paraître contradictoire par rapport à ce que je viens de dire au sujet de ceux qui ont montré leur vrai visage pendant ces dix-sept dernières années. En 1990 cependant, j´ai écrit un texte destiné à tous les upécistes en préparation du retour au Cameroun du système multipartite et de la sortie de clandestinité. Avant cela en effet, n´était upéciste que celui qui avait été accepté par nous. On ne pouvait pas faire autrement dans la clandestinité. Dans la situation de légalité, nous fonctionnons comme tous les autres partis et l´upéciste est celui qui demande à l´être bien que nous ne soyons pas obligés d´accepter dans le parti quelqu´un qui est contre l´Upc.
Certains peuvent se dire upécistes. Mais nous avons les preuves, par millions, qu´ils mentent… Si je suis dirigeant du congrès aujourd´hui et que M. Kodock s´y présente, je lui demanderai d´abord de nous dire ce qu´il a fait de son accord avec le Rdpc. Il y a des gens que l´on connaît, mais je cite cet exemple parce qu´il est le plus symbolique, nous devons leur demander : qu´est-ce que vous avez fait ? Mais cette stratégie de rassemblement semble déjà avoir perdu l´Upc dans les années 1990. Le bénéfice des années d´expérience que vous évoquez aujourd´hui existait déjà pour juger certains qui appartenaient au pouvoir et qui se sont présentés à l´Upc en 1990. Depuis 1991 et jusqu´au moment où je vous parle, c´est la stratégie inverse qui a prévalu. C´est l´auto exclusion…
Mais il y a eu le congrès unitaire de 1996 à Yaoundé… En 1996, on n´a pas réuni tout le monde. On a certes réuni la majorité mais cela a échoué plus tard parce qu´on y est venu avec des arrière-pensées comme en 1991 [Année où se tinrent les deux congrès de Bamougoum (branche des fidèles) et de Nkongsamba (faction de MM. Kodock et Ntumazah)]. Ce n´est pas cependant une raison pour ne pas recommencer. Il y a à ce sujet une question formelle qui est celle de l´adhésion au parti et un aspect politique qui veut qu´il appartient aux dirigeants d´apprécier l´opportunité de tel ou tel rassemblement. Je prétends qu´en 1996, il n´était pas opportun de tenir un tel congrès. Si vous relisez mes déclarations aux journaux, vous verrez que j´avais dit dès le jour de l´ouverture du congrès de 1996 que de ce congrès ne sortira pas une direction upéciste.
Bien que le secrétaire général élu à l´époque feu Michel Ndoh fût un des vôtres ? Il ne suffit pas d´être secrétaire général upéciste pour avoir une direction upéciste. Moi je l´ai été et je sais donc de quoi je parle. Il faut en effet des moyens d´action. Ce qui compte c´est d´avoir un leadership, un groupe de personnes d´accord sur un objectif lointain, qui travaillent ensemble quotidiennement, qui ont un minimum d´estime l´un pour l´autre. Non pas des gens qui font une réunion et qui s´insultent l´instant d´après dans la rue. Cette direction-là, on ne l´a toujours pas.
Comment l´Upc peut-elle procéder pour l´avoir ? Faut-il que passe la génération actuelle des dirigeants ? Il faut que les upécistes s´expriment sur la question. C´est pour cela que j´ai écrit mon livre (Un congrès envers et contre tout, Paris, 2006, Editions Menaibuc). Je l´ai écrit pour qu´ils comprennent ce qui s´est passé. Je suis content de voir que depuis que je l´ai écrit je ne suis pas contesté. Même pas par des personnes qui ont été indexées nommément. Il faut donc que les upécistes sachent ce qui s´est passé et dans un congrès, ils puissent décider qu´elle est la ligne politique qu´ils veulent suivre. Qu´ils discutent même du type de parti dont ils veulent : est-ce un parti élitiste ou populaire ?
Vous relevez la volonté des upécistes d´avancer. Vous mentionnez leur présence. Le problème à votre avis, c´est la direction actuelle de l´Upc. Etes-vous donc pour qu´elle rende sa copie? Je n´ai pas la compétence pour dire à une direction de rendre sa copie. J´ai le droit comme tout militant, ou même comme tout citoyen, de dire ce que je pense de la situation de l´Upc. Mais il ne me revient pas de dire ce qu´il faut faire de la direction. Je dis simplement ce que je pense bon de faire pour que le parti sorte la tête de l´eau.
Finalement c´est la quadrature du cercle. Les militants voudraient avancer. Les dirigeants ne le veulent pas. Mais ces militants ne peuvent contraindre la direction… Il faut corriger : certains dirigeants ne veulent pas avancer.
Il faut croire que c´est l´essentiel des dirigeants sinon la volonté des militants additionnée à celle des dirigeants progressistes ferait bouger les lignes. Mais finalement, l´Upc patauge et certains se demandent si les Camerounais qui y ont adhéré n´auraient pas besoin d´une nouvelle Upc débarrassée de ses pesanteurs historiques ? C´est une des voies possibles. Beaucoup le disent: l´Upc charrie énormément d´émotions. Il y a des gens qui disent qu´il serait peut-être temps d´abandonner le sigle pour reconstituer les forces. Il ne m´appartient pas de trancher mais c´est vrai que c´est une des lignes possibles. Dans d´autres pays on l´a vu. Le Pai [Parti africain de l´indépendance] au Sénégal avait une charge historique, émotionnelle, patriotique à peu près comparable à celle de l´Upc. Mais le Pai n´existe plus. Il est le père de trois ou quatre partis importants aujourd´hui sur la scène sénégalaise. Je ne dis pas qu´il faut faire pareil, mais il y a au moins matière à débat. D´autres vont plus loin que cela et disent que l´Upc a accompli sa mission historique et qu´elle doit disparaître. Je ne suis pas loin de penser comme eux. On peut effectivement penser que l´Upc a accompli sa mission historique et qu´il est temps qu´elle cède la place à une autre organisation.
Et dans vos débats au sein du parti, que disent vos camarades à ce sujet ? Tout le monde n´a pas la même vision des choses. Et c´est bien pour cela qu´il faut qu´il y ait débat. Mon souhait le plus ardent est que les upécistes se réunissent pour en discuter. Et si face à cette nécessité des responsables politiques s´aventurent à convoquer un congrès groupusculaire, je le redis avec force, ce serait extrêmement grave. Si le nœud du problème est donc là : rassembler les upécistes, il n´y a pas que la direction du parti qui puisse le faire. Vous avez vos camarades qui ont pris des chemins à côté de l´Upc, le Mn, le Manidem. Si la légitimité de convoquer un congrès peut revenir à tout le monde qui se dit upéciste… Je ne l´ai pas dit. Tout le monde ne peut convoquer un congrès des upécistes. La convocation d´un congrès de parti politique quel qu´il soit est la prérogative exclusive de la direction du parti. Il est hors de question qu´un autre parti que l´Upc convoque le congrès de l´Upc.
Même quand elle s´y refuse ? C´est une lutte à mener. Je ne sais pas sur quoi elle va déboucher, mais c´est une lutte à mener.
Ceux qui pensent comme vous ne peuvent-ils pas se décider ? Se décider à faire quoi ? Je n´ai aucune compétence pour convoquer un congrès de l´Upc. Non pas un congrès de l´Upc mais de ceux qui se disent upécistes. Si on va dans cette voie-là, il faut aller jusqu´au bout, ce serait un autre parti, pas l´Upc. On ne peut pas convoquer un congrès en faisant fi de la direction et sortir de ce congrès un nouveau parti identique. On ne serait plus à l´Upc.
Mais l´Upc n´est-elle pas une enveloppe qui est moins importante que la lettre qu´elle contient ? Je suis d´accord avec vous. Mais en politique comme en toute autre chose, il y a l´aspect formel.
A votre avis, qu´est-ce qui primerait aujourd´hui, le fond c´est-à-dire le combat de l´Upc pour un certain Cameroun, ou alors l´Upc telle qu´elle est en attendant qu´elle soit capable de convoquer ce congrès unitaire que vous espérez ? C´est le fond qui est important. Le principal reproche que l´on peut en effet faire à la direction du parti aujourd´hui, c´est qu´on ne voit pas le parti aller dans la direction fixée par les fondateurs. Mais je ne pense pas qu´en convoquant un congrès contre la volonté des dirigeants actuels de l´Upc on irait dans le sens de la réalisation des objectifs fondamentaux. Ce serait créer un nouveau débat, un nouveau conflit, qui va durer des années.
Le débat ne peut-il pas être tranché par les militants et l´avancement d´une telle organisation ? Mais comment le faire concrètement ? Je crois que l´Upc aujourd´hui ne peut retrouver la possibilité de renaître que dans un système démocratique. Ceux qui disent qu´ils sont upécistes doivent se battre d´abord pour le changement démocratique. Ce qui pose le problème des alliances.
Peut-on dissocier le combat upéciste du combat démocratique ? On ne peut les dissocier mais à chaque moment donné il faut décider sur la voie à suivre. C´est la prérogative des dirigeants politiques car si le peuple détient le pouvoir, il ne peut pas décider de tout dans son ensemble. Il faut que des dirigeants indiquent des orientations qui donnent lieu à débat et à un choix. Les deux combats peuvent être menés parallèlement ou simultanément, tout dépend du contexte. La politique ce n´est pas les mathématiques.
Finalement, on peut se demander pourquoi avec une telle vie des idées, l´Upc ne bouge pas ? Les choses ont quand même évolué depuis 1992. Il y a une clarification. 15 ans, c´est bien le temps qu´il faut pour mûrir une idée, à l´échelle d´une nation. Il est temps maintenant de changer de cap, de reconstruire une nouvelle stratégie, parce que l´un des maux de 1992 c´est que les gens étaient pressés. A l´Upc aussi, les gens étaient pressés de prendre le pouvoir. Aujourd´hui, tout le monde a compris que ce n´est pas en six mois de villes mortes que l´on va changer radicalement les choses.
Aujourd´hui, la responsabilité de la relance incombe à qui ? Si on parle de l´Upc, elle pèse sur la tête des dirigeants de manière absolue. Ils ont la charge d´orienter les militants.
Quels regards jetez-vous sur l´opposition qui existe à côté de l´Upc depuis 1990 ? Elle pèche par les mêmes maux. L´opposition, c´est une mauvaise appréciation de la situation dès 1991, c´est l´absence de leadership. Dans la Coordination des partis de l´opposition en 1991 il y avait trois organisations qui disposaient d´une capacité réelle de mobilisation et d´influence sur les populations : l´Upc, le Sdf et Cap Liberté. Mais il y avait une foule de petits organismes qui parlaient plus forts que tout le monde. Ces trois organisations pouvaient tout décider. Mais cela ne s´est pas fait. Ce schéma s´est reproduit avec l´Union pour le changement, l´Arc-Cns et plus récemment la Cnrr en 2004 : mêmes formalités, mêmes conclusions. Dans le dernier cas, chacun pensait pouvoir rouler l´autre et être candidat unique. Là aussi, il faut un leadership.
Prises individuellement, voyez-vous des forces politiques capables de prendre le pouvoir ? Je ne vois aucun parti politique capable de le faire. Je n´en vois pas.
Quelles possibilités de changement entrevoyez-vous donc à la tête de l´Etat ? Jusqu´au 25 février 2008, les observateurs qui aiment le Cameroun posaient un problème en disant : voilà un peuple qui aime le progrès, qui est le premier pays indépendant d´Afrique noire francophone, qui a pris des armes pour se libérer du colonialisme, et qui est devenu atone. Depuis le 25 février, on a la réponse. On sait désormais que le peuple camerounais est capable de revendiquer ses droits dans la rue face aux fusils. On le savait depuis 1990 mais on l´avait oublié. C´est la donnée principale du problème. J´ai entendu en effet un homme que j´aime beaucoup, Achille Mbembe, dire que les Camerounais sont à genoux parce qu´ils ne veulent pas payer le prix de la liberté, c´est-à-dire le prix du sang. J´ai répondu que si on compte le sang versé en Afrique pour la liberté, nous en avons versé plus qu´il n´en faut : avant l´indépendance, après, en 1990, on en a encore versé le 25 février. Que faut-il de plus ? Si le prix de la liberté c´est le sang, on a montré à plusieurs reprises que nous pouvons verser notre sang pour notre pays.
La deuxième donnée importante est que le mécontentement est à un point tel qu´il ne faut pas grand-chose pour qu´une insurrection éclate. Qu´est-ce qu´il manque ? Un leadership. Pour répondre à votre question je dirai qu´il n´est pas possible de connaître exactement le demain. Il y a peut être des forces dans ce pays qui sont à l´œuvre, mais si demain, il émerge un leadership, avec des moyens humains, matériels et même diplomatiques, je suis convaincu que les choses vont changer. Vous parlez de diplomatie, le Cameroun semble interdit à tout bouleversement par la volonté des grandes puissances… Je n´en suis pas convaincu. Voyez les déclarations de certains représentants de ces pays ici au Cameroun. Je ne suis pas convaincu que nous soyons dans la situation de 1960 où rien ne pouvait bouger dans le pré carré sans que l´armée française n´intervienne tout de suite. Ce que je veux dire c´est qu´il n´est pas impossible que les Camerounais trouvent des voix qui les écoutent dans le monde.
Et lorsque vous dites qu´il est possible de voir émerger d´autres forces, est-ce à dire que l´Upc peut être absente du rendez-vous final du combat qu´elle livre depuis 60 ans ? Je le crains et je ne cesse de le dire à mes camarades. Si l´Upc veut être au moins participante à l´œuvre du changement, il faut nous réorganiser. Sinon on sera des témoins assis regardant passer la caravane.
Parlons un peu de vous M. Kuissu. Vous êtes probablement le secrétaire général le plus éphémère de l´histoire de l´Upc de décembre 1991 à avril 1992. Le seul qui soit vivant, dans le parti et qui ne soit plus en fonction. Comment présenter un homme aussi particulier ? Je suis ancien secrétaire général de l´Upc et j´en suis fier. Il y a ceux qui sont secrétaires généraux et qui veulent y demeurer à vie et ceux qui sont morts. Je revendique cette histoire avec fierté.
Comment peut-on monter si haut et redescendre dans l´anonymat alors qu´on a été élu par 92% de ses camarades ? J´ai simplement tiré les conclusions de quatre mois d´activités comme secrétaire général au sortir du premier congrès de l´Upc après trente-cinq ans de clandestinité. C´est un fait que même les dirigeants de l´Upc ont tu en énumérant les événements importants de ces dernières années.
C´est quand même extraordinaire qu´un leader massivement soutenu abandonne… J´ai abandonné la situation de secrétaire général et de membre du comité directeur. Je n´ai pas abandonné le combat pour la démocratisation du Cameroun. Si au regard de ce qui s´est passé et du soutien de vos camarades ils vous rétorquaient que vous n´en aviez pas le droit... Beaucoup me l´ont dit parce qu´ils ne savent pas la vérité. A quoi sert un secrétaire général qui n´a pas les moyens de son action ? A quoi sert un secrétaire général qui est systématiquement mis en minorité dans les débats au sein de la direction ? A quoi sert un secrétaire général dont les directives et les orientations politiques sont combattues à la base par des camarades montés par des membres de la direction du parti ? Depuis que j´ai démissionné j´ai beaucoup travaillé. Je n´aurais pas pu faire ce travail du temps où j´étais secrétaire général.
Cela signifie-t-il que 90% de militants qui soutiennent un dirigeant ne peuvent pas changer la donne à l´Upc, un parti qui réclame de la qualité dans la formation de ses adhérents ? Cela signifie une seule chose : c´est que malheureusement la capacité de manipulation des dirigeants politiques est très importante. Même dans un parti démocratique et d´avant-garde.
Tous ces combats internes et ces rancoeurs accumulées ne sont-ils pas la véritable cause de la situation de l´Upc ? Les gens le disent mais je ne veux pas y croire. J´ai des critiques politiques, pas personnelles.
Et les autres ? Je ne sais pas. Je ne règle pas des comptes. Il faudrait leur demander.
Puisqu´ils ne répondent pas à vos idées politiques. Qu´est-ce que c´est ? C´est du subjectivisme débridé. Je l´ai connu avant l´ouverture politique. Certains de mes camarades sont d´un subjectivisme que l´on ne saurait imaginer. J´ai l´impression d´agir, pour ma part, comme il faudrait le faire.
Source:
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