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09.08.2013
Banque Centrale de la Diaspora : un élément de solution aux problèmes de l’Afrique Noire
D’après des rapports de la Banque Mondiale, la diaspora Africaine transfère annuellement, et ceci depuis quelques années, environ 40 milliards de dollars en direction de l’Afrique noire; or le problème majeur auquel est confronté le milieu des affaires dans cette partie du continent est celui de l’accès aux capitaux, apprend t-on en lisant le ‘ African Competitiveness – Report 2013 ‘. Dans le même temps, avec son taux de croissance annuel d’environ 5%, l’Afrique noire est probablement la région du monde dans laquelle les investissements sont le plus rentables.
La question devient dès lors de savoir ce qu’il y a lieu de faire pour que la diaspora Africaine saisisse toutes les opportunités offertes par le continent, et qu’en retour elle contribue au développement de celui-ci. La diaspora a non seulement la volonté de le faire, ce qui est une bonne chose, mais à la vérité, elle a en plus et surtout intérêt à le faire.
Pour ce qui est de la volonté, une étude menée par l’Université Georges Washington (Center for International Business Education and Research) auprès de professionnels et entrepreneurs Africains de la diaspora, nous apprend que : dans la plupart des cas, les personnes interrogées disent leur préférence à investir ‘’ à la maison’’ si l’opportunité venait à se présenter. Quant au volet intérêt, une étude de la Banque Mondiale nous indique que, notre diaspora dispose également d’une bagatelle de 35 milliards de dollars déposés dans les comptes d’épargne des banques occidentales, et que ces dépôts produisent des intérêts négatifs si l’on tient compte des ajustements dus à l’inflation.
Au vu de tout ce qui a été dit précédemment, il s’ensuit naturellement qu’une banque centrale de la diaspora constitue la passerelle manquante; cette banque sera non seulement un pôle de concentration financière, mais elle offrira également aux Africains l’opportunité d’investir dans tous les pays de la région, tout en leur permettant de s’offrir des produits financiers à rentabilité supérieure à ceux qui leurs sont proposés en Occident. Nous insistons ici sur le caractère central de cette banque, car aller en rang dispersé nous ferait perdre non seulement en efficacité, mais surtout, nous perdrons la force de frappe que représente le capital concentré. L’idée de mettre en place des structures tendant à favoriser le retour au bercail des fonds de la diaspora n’est pas nouvelle, d’ailleurs, certains pays comme le Ghana, le Kenya, et le Rwanda pour n’en citer que quelques uns se sont déjà engagés dans cette voie.
Le Ghana et le Kenya ont créé des banques commerciales locales dans lesquelles des produits financiers très attractifs sont proposés à leurs ressortissants vivant à l’extérieure. Le Rwanda a quant à lui créé des fonds mutuels destinés à sa diaspora.
Toutes ces initiatives individuelles, même si elles sont à saluer, diluent néanmoins comme nous l’avons déjà souligné la puissance et la force de frappe que pourrait avoir une banque centrale de la diaspora. Nous devons trouver les voies et moyens de travailler ensemble, la dispersion de nos énergies n’est pas une bonne option.
Quarante milliards de dollars représentent tout de même à peu-près le PNB du Sénégal (14,16 milliards), du Mali (10,31 milliards), du Burkina-Faso (10,44 milliards), du Niger (6,568 milliards), et de la Mauritanie (4,199 milliards) pris ensemble.
L’opportunité d’investir dans tous les pays à partir d’un seul point n’est pas non plus à négliger, d’ailleurs, la compétition aidant, tous nos pays seront obligés de faire toutes les reformes nécessaires à l’assainissement de l’environnement financier, au risque de fermer la porte à la manne financière que représentent les fonds de la diaspora. Pour une fois, nos dirigeants se verront offrir une alternative aux mesures imposées par les institutions financières étrangères.
Nous insistons également sur le fait que nous demanderons à nos dirigeants de faire leur part de travail. Ils n’ont d’ailleurs pas à attendre que tout soit mis sur pied avant de s’engager dans les reformes du paysage financier ; et l’harmonisation des régulations. D’un pays à l’autre, l’on ne devrait pas faire face à des règles différentes.
Les principaux maux qui freinent la bonne marche des affaires sont bien documentés ; il s’agit en gros de la corruption, de la lourde bureaucratie, de l’insuffisance de la formation, des régimes fiscaux compliqués, et des infrastructures insuffisantes. L’Union Africaine peut jouer un rôle dans la coordination des reformes nécessaires.
L’entrée de la diaspora dans le marché des capitaux en Afrique va forcément faire quelques mecontents, notamment parmi ceux qui étaient habitués à évoluer sur nos marchés sans une concurrence d’envergure. Aujourd’hui, presque toutes nos anciennes sociétés parapubliques sont entre des mains étrangères; que ce soit la distribution d’électricité, d’eau, de téléphonie et j’en passe. Ces compagnies dégagent des profits astronomiques, dans le même temps la qualité du service laisse à désirer ; les délestages et les rationnements d’eau et d’énergie sont légions et font désormais parties du vécu quotidien de nos concitoyens.
La menace que pose une telle banque pour de tels profits va susciter beaucoup de réactions ; certaines parmi elles seront très subtiles ; hormis la force, nos adversaires vont essentiellement se servir de la diversion et de la division, avec comme objectif final de détourner ou de saborder le projet; nous devons être vigilants.
Attendons-nous à des offres de partenariat sur des projets en apparence attractifs mais sur le fond bidon et vide de toute substance, dont le seul but sera de créer la diversion.
Attendons nous également à voir l’émergence d’une nouvelle ‘’élite’’ dans la diaspora; cette élite sera la seule qui aura accès aux medias étrangers et aux ‘’grands’’ de ce monde, mais cette élite aura pour mission réelle de saboter tout projet de nature à favoriser l’émancipation de l’Afrique. Nous tenons tout de même à rappeler aux uns et aux autres qu’une Afrique forte est une bonne chose pour l’économie du monde ; qu’une Afrique débarrassée du chômage endémique serait un gros marché pour tout le monde ; mais avec les operateurs économiques étrangers d’aujourd’hui, la situation n’est pas prête de s’améliorer.
Nous trouvons surprenant que des gens puissent s’étonner qu’avec un taux de croissance annuel de 5%, le taux de chômage demeure toujours aussi élevé en Afrique ; mais à y regarder de très près, Il n’y a rien détonnant à cela ; en effet la plus grande part des profits dégagés en Afrique n’est pas véritablement réinvestie sur place, sauf s’il s’agit de récupérer une société parapublique à fort potentiel. Ces actes de prédation aboutissent presque toujours à la mise au chômage d’un plus grand nombre d’employés.
En conclusion, nous disons que la création d’une banque n’est pas une œuvre de philanthropie; une banque de la diaspora permettrait aux Africains vivant à l’étranger de faire des investissements profitables tout en minimisant les risques et en participant à l’effort de développement du continent. Nos pays auront dans le processus les capitaux suffisants pour couvrir leurs besoins, et nos compagnies stratégiques ne seront plus bradées à des entreprises étrangères.
Ceux qui pensent autrement doivent se souvenir d’une chose ; que nous Africains, nous ne sommes presque jamais chez nous chez les autres (à l’étranger), et si nous ne faisons rien pour sérieusement aider l’Afrique, nous deviendrons également des étrangers chez nous, ce qui serait une tragédie.
Paul Daniel Bekima Afriqinter Radio & Le Sphinx’s Senior Political Analyst
(Vous pouvez ecouter Paul Daniel Bekima tous les Dimanches à partir de 16 :30 (Eastern Time) sur Afriqinter Radio (www.afriqinter.com))
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