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23.10.2005
Vive émotion dans la rue Dikoumè Bell, à Bali.
Samuel Makembè tué à la rue de la joie
Vive émotion dans la rue Dikoumè Bell, à Bali. L’ancien sociétaire de l’Oryx club de Douala, fils du village a trouvé la mort en allant séparer une bagarre entre une femme inspecteur de police et son compagnon d’un soir.
Les portes de la concession, rue Dikoumè Bell que l’on a fini par surnommé Rue de la joie, à Bali, sont restées ouvertes depuis le drame de la nuit de samedi 12 novembre. Les nombreuses et incessantes allées et venues témoignent de la profondeur du choc ressenti par les proches et la famille. Samuel Makembè, la soixantaine bien entamée, le maître des lieux du débit de boisson “ Jamaïca ”, à quelques centaines de mètres de l’Hôtel des Roses a trouvé la mort en allant séparer une bagarre entre une femme et un homme. L’affrontement avait débuté dans un autre bar des lieux dénommé “ Le Grand Pivot ”.
Lundi, 14 novembre dans la journée, le Prince René Bell, chef supérieur du canton Bellois est descendu sur le terrain, furieux: “ Je ne veux plus qu’il y ait une rue de la joie dans mon fief. Nous allons nous réunir avec les habitants du quartier dans ce sens dans les tout prochains jours ”, a-t-il déclaré avant de reprendre le chemin de son domicile. Pour comprendre l’attitude du Prince René et de l’ensemble des riverains de ce coin bien agité de Bali, il faut tendre l’oreille vers les témoins du drame: “ C’est vers 23 heures que j’ai été réveillé par des cris et des hurlements. Au moment où je pointe le bout de mon nez dehors, il me semble que la bagarre est déjà terminée. Mais personne ne mesure qu’un drame est en train de se dérouler. La rue Dikoumè Bell n’étant pas illuminée, on voit seulement une foule compacte sans distinction aucune de ce qui se passe ”, raconte celui que l’on appelle affectueusement Ricardo et qui habite à côté du “Grand Pivot”, là même où la bagarre a commencé.
Comportements irresponsables
La suite de l’affaire, c’est Monlaman Armelle Nina Chanceline, qui partageait la même concession que le défunt, qui la raconte: “ Nous buvions un verre à “ Jamaïca ” avec Tonton Makembè, vers 22h45. Puis, nous avons vu une bagarre se déclencher au “ Grand Pivot ”, en face. Une femme grande de taille et baraquée menaçait un homme en le tenant par le collet. La rixe s’est déplacée de quelques mètres jusqu’à se poursuivre exactement de l’autre côté du carrefour où se trouve le “ Jamaïca ”. C’est alors que Tonton Makembè m’a dit qu’il ne peut continuer à laisser une femme pourchasser un homme et le harceler de la sorte sans les séparer. Je le lui ai déconseillé. Malheureusement, il m’a pris par la main et nous avons traversé la rue. ” Samuel Makembè ne sait pas alors que son séjour sur terre touchait à la fin. Il va essayer de calmer la femme en furie mais en vain: “ Cette femme a giflé Tonton Makembè qui, surpris, va reculer. Mais, un des hommes qui tentait de séparer la bagarre depuis “ Le Grand Pivot ”, a raclé Tonton en lui demandant de quoi il se mêlait. La dame à son tour m’a frappée et je suis tombée ”, témoigne encore Armelle Nina, 20 ans. Elle se relève péniblement mais à sa surprise aucun des ivrognes qui sont là à se saouler de bière ne bouge. “ J’ai couru jusqu’à la maison de la soeur de Tonton Makembè mais elle ne m’a pas entendu cogner à sa porte. J’ai donc continué jusqu’au domicile du pasteur Endènè qui viendra au secours. Puis je suis revenu voir si Tonton Makèmbè était toujours là. ”
Armelle Nina va aussitôt prendre les jambes à son cou pour avoir les dernières nouvelles de son Tonton: “ Je l’ai trouvé aux urgences de l’Hôpital Laquintinie, couvert d’un drap blanc. Il était déjà mort ”, relate la jeune fille. Entre-temps, la police arrivée sur les lieux du drame a fait embarquer l’homme et la femme suspectés d’avoir asséné des coups qui ont écourté la vie de Samuel Makembè. Ils méditent leur sort à la police judiciaire à Bonanjo, au moins le temps de l’enquête. On sait d’ores et déjà que la femme violente serait un inspecteur de police. Mais qui n’était ni en tenue, ni de service pendant cette folle soirée. L’ancien joueur de l’Oryx de Douala a fait les frais des agissements inqualifiables des gens qui, chargés de veiller sur la sécurité des citoyens, sont davantage sous l’emprise de l’alcool et/ou non devenus leurs bourreaux.
Ce drame pose avec acuité la question de l’existence des rues de la joie dans la capitale économique du Cameroun. Celle de Bali a ouvert il y a environ cinq ans, bien après la doyenne de ces rues à Deido et avant celles de Bonapriso et plus récemment de Nkonmondo. Des rues qui sont de véritables lieux de débauche où la jouissance et le plaisir des sens ont été érigés en règle commune de vie. Et tant pis pour ceux des riverains qui aimeraient vivre dans le calme des villages d’antan. Combien faudra-t-il qu’il y ait de morts pour que ces comportements irresponsables cessent?
Par Jean-Célestin EDJANGUE
Le 16-11-2005
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