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19.04.2006
Gardien de l’Oryx de Douala : Tokoto Rodolphe n’est plus
Son imposante silhouette dans les cages du club Bellois a fait le bonheur du canton à l’époque des Mbappè Lépé, Maurice Epété et autres Elémé Ricardo. Le légendaire gardien, vainqueur de la première coupe d’Afrique des Clubs champions est décédé vendredi 7 avril dernier à son domicile à Bali-Douala. De suite de maladie.
“ Il était venu à l’Oryx pour jouer comme avant-centre. Mais alors qu’il était titularisé pour la première fois à ce poste, en 1963 lors du match Oryx-Tonnerre de Yaoundé au stade Akwa, à Douala, Rodolphe est monté très haut pour frapper le ballon de la tête. Malheureusement, à sa descente, il s’est mal réceptionné et s’est fait une hématose au niveau du genou gauche ”, raconte Elémè Ricardo, ex-sociétaire du club Bellois. Pour lui, Rodolphe Tokoto, décédé vendredi dernier, 7 avril à son domicile à Bali juste derrière l’Immeuble Hogmeni, est devenu gardien de but par hasard : “ Mais comme à ce moment-là, nous avions d’énormes difficultés à avoir un vrai gardien de but... ”.
En ce début des années 60, Arnopoulos a gardé les cages de l’équipe des Mbappè Lépè, Maurice Epété et autres Makembè jusqu’en 1962. A son départ, ni Elessa Denis ni Essomba Samuel alias Bell, n’entendent être pris pour des gardiens de but de prédilection. Et pour cause ! A cette époque, le dernier rempart est souvent accusé de tous les maux qui arrivent à l’équipe, autant d’ailleurs qu’il est déifié en cas de bons résultats : “ Un jour, alors que personne ne voulait garder nos buts, Mbappè Lépé s’est proposé d’être notre portier. Et il s’est plutôt bien acquitté de cette tâche ”, se souvient encore Ricardo.
Dans ce contexte, la venue de Tokoto Rodolphe dans le club du canton Bell et surtout, sa blessure alors qu’il postulait à jouer avant-centre, ont fini par faire le bonheur de “ Jemea ”.Un autre témoignage, d’un joueur qui évoluait alors chez les Bana ba Njoh, celui de Sosso : “ J’ai connu Rodolphe d’abord comme un frère, avant même le footballeur. Je l’appelais affectueusement “ Araignée ” parce qu’il arrêtait tout ce qui gravitait autour de ses buts. Et lui m’appelait “ Biche ”, faisant allusion à ma vitesse de course. Bien sûr pendant le match nous étions adversaires. Mais aussitôt le coup de sifflet final donné, nous nous retrouvions dans l’un
desbars les plus en vogue de l’époque. Soit à Catherine bar à Deido, à Mermoz bar à Akwa ou encore à Oryx bar à Bali. Là c’était la fête, la joie d’être entre nous joueurs, sans les dirigeants. Nous avions tellement de chaleur entre nous... ”, poursuit Sosso.
L’homme d’Accra
Homme chaleureux, Rodolphe Tokoto, le légendaire goal-keeper aux jambes si particulières de l’Oryx club de Douala, était un passionné du chant choral. Une autre manière sans doute de s’exprimer, lui qui, même sur les terrains de football parlait si peu : “ Il est entré très jeune à la chorale de Dipita Bali et deviendra plus tard ancien de l’Eglise. ”, témoigne-t-on encore dans son entourage. Mais l’une des images que Ricardo conserve de celui que ses coéquipiers surnommaient “ Kata Hum ”, du fait de la force et de la puissance de son coup de poing, c’est sa prestation lors de la rencontre contre Ashanti Kotoko de Kumassi, un certain dimanche de décembre 1965 : “ Toute l’équipe avait été au même niveau, soudée, volontaire. Mais, l’omniprésence de Rodolphe nous a permis de revenir avec le trophée au Cameroun ”. D’ailleurs, le mythique portier des jaunes et noirs va être appelé à l’équipe nationale de football du Cameroun dès son retour triomphant. Il servira ainsi le sport roi jusqu’en 1974, date à laquelle il raccrochera définitivement les crampons. Mais comme il était de ses rares joueurs qui voyaient au-delà du factuel, il avait préparé sa reconversion.
C’est ainsi qu’il passera quelques années au port, chez Soaem (1971-76), puis chez Socopao (1977-93), Stc (1993-95) et à Sdv (1995-2003). Dans ces entreprises, comme dans l’Oryx club de Douala, il appliquait la même philosophie : “ C’était un papa simple, peu bavard, mais tellement généreux. Il aimait offrir le peu qu’il avait. Pour lui, la vie était comme le sport. Faite de respect de soi et des autres, de fraternité et de solidarité ”, pense son beau-fils, Daniel, qui a toujours été aux côtés de Tokoto Rodolphe, particulièrement durant ces trois dernières années où la maladie a fini par le vaincre, vendredi 7 avril matin. Le programme des obsèques n’est pas encore arrêté. Le gardien des buts de la grande époque de l’Oryx de Douala laisse une veuve et un fils de 23 ans. Il avait 61 ans.
Par Jean-Célestin EDJANGUE
Le Messager
13.04.06
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