Ce n´est pas qu´une bibliothèque qui a brûlé au moment où Daniel Doumbe Eyango a poussé son dernier souffle jeudi dernier. C´est aussi plus de 70 ans des plus belles lignes de la musique religieuse camerounaise, son domaine de prédilection, que la plume du disparu abandonnera à la postérité. Après plusieurs années de maladie et un état qui s´est dégradé avec le poids de l´âge, Daniel Doumbe Eyango s´est éteint, comme le dit son ami et ancien compagnon de chorale Jean-Paul Toko, " au moment où on s´y attendait le moins ". Son fils, le colonel Narcisse Eyango raconte ses dernières heures, au moment où il s´est assoupi comme il lui arrivait souvent depuis quelque temps. Sauf que là, les yeux de patriarche du gospel de 92 ans ne s´ouvriront plus.
Daniel Doumbe Eyango, un homme que les moins de 20 ans auront très peu connu. Né le 24 avril d´une année marquée dans l´histoire de l´humanité (1914), ce fils de Bonéjang (Akwa) fait ses premières cordes musicales au violon. C´est dans un grand cabaret de Douala qu´il fait ses dents dans la musique, avant d´être rattrapé par l´encadrement chrétien de sa famille. Dès lors, il mettra son talent au service de l´église du Centenaire d´Akwa, à laquelle il appartient. Daniel Doumbe Eyango, compositeur de talent - de génie même dit-on- devient vite un bâtisseur dans la tendance Gospel, en fondant tour à tour la première fédération des chorales mixtes du Cameroun (M.E.Y), l´orchestre classique " Dany-Boy´s ", ou encore le petit conservatoire Sona - Club en 1980.
L´originalité de l´artiste s´affirme par son souci de se démarquer des airs occidentaux d´autres grands maîtres de musique comme Mozart, Bach ou Mendelson, et de créer des mélodies proprement inspirées des réalités du terroir. Illustration dans quelques-unes de ses oeuvres les plus célèbres comme Africa, Bepuma ba mudi, etc. Au gré des affectations et des rencontres, le Grand maître Doumbe Eyango participe à de nombreux projets et compose plusieurs oeuvres d´envergure. En 2002, on croit la fin artistique de l´homme arrivée. Suite au décès de son épouse Elise, l´affliction est totale. Daniel Doumbe semble en manque de repères, mais surtout de cette passion de travailler qui l´ a toujours animé. Mais après avoir surmonté la douleur, il va dédier à son épouse défunte sa dernière grande oeuvre. L´une des plus
belles : " Maman ".
De l´homme, beaucoup retiendront son perfectionnisme. Un sens élevé du détail, de la rigueur et de la méticulosité dans le travail. Mais aussi une très grande élégance et un goût prononcé pour la vie, qu´il mordit à pleines dents tant qu´il en eut l´énergie. Il laissera derrière lui dix enfants. Et surtout, un héritage musical inestimable, consigné dans de précieux documents.