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20.03.2007
Bobby James Nguimè : Le testament du makossa était une malicieuse copie de mon initiative.
Après tant d´années d´absence, qu´est ce qui peut bien justifier votre présence ces jours-ci au Cameroun?
Le Cameroun, c´est avant tout mon pays. Disons qu´il y a quatre mois j´ai été victime d´un grave accident de circulation à Paris, qui m´a entraîné dans un profond coma. Après ma convalescence, j´ai pris la résolution de venir me reposer au pays et mettre un terme aux rumeurs. Parti du Cameroun il y a bien longtemps, c´était aussi normal de revenir me ressourcer auprès des miens. C´est bon pour le moral. Hormis tout ceci, je suis en pourparlers avec des amis pour la réalisation de quelques projets. De temps en temps, je peux rencontrer des amis pour des soirées de musique.
Vous parlez de projets à réaliser, c´est quoi exactement?
En qualité d´artiste musicien, il y a toujours quelque chose à partager avec les autres. Les projets en question sont toujours en étude malgré leurs avancées. Il s´agit beaucoup plus de l´encadrement des jeunes pour la redynamisation de notre musique. Il n´est un secret pour personne que notre musique se meurt. Il serait honteux que nous croisions les bras. De toutes les façons le moment venu, vous saurez concrètement de quoi il est question dans ce projet de redynamisation de notre musique.
Quelles idées faites-vous de la musique camerounaise de nos jours?
J´ai toujours gardé une oreille attentive sur les œuvres de mes compatriotes. La musique camerounaise connaît en ce moment de sérieux problèmes et cela à tous les niveaux. Tel un malade, elle a besoin d´une assistance médicale appropriée au risque de la voir disparaître complètement. De nos jours, les génies se font de plus en plus rares, il n´y a plus d´originalité dans les compositions. Tout le monde préfère copier ailleurs et ramener des sonorités parfois étrangères à notre culture, pas pour l´enrichissement de soi, mais pour se faire de l´argent. Ce manque d´originalité se traduit par des textes vides sans message apparent. Heureusement, quelques-uns font la différence et sortent du lot.
N´est-ce pas la raison pour laquelle vous aviez pensé au concept "La bible du makossa" dans les années 90?
Effectivement, c´était pour remettre le makossa sur les rails. Issu d´une famille de musiciens, tout petit je rêvais de mettre un jour toutes les musiques camerounaises sur un seul et même support. Devenu grand, ce rêve était plus qu´un impératif au regard des difficultés que rencontrait le makossa à se maintenir au hit parade. C´est d´ailleurs au Cameroun que j´ai fait la première maquette en compagnie de mon frère aîné, le regretté Pablo Ekambi, Yves Mbimbé Lobé. Au niveau de l´écoute, cette " bible " a bien marché et a rappelé à beaucoup le bon vieux temps du makossa. Ce qui m´a obligé de mettre sur le marché quatre autres volumes. Malheureusement, personne n´a voulu s´en inspirer. Puis, j´ai été découragé par "Le testament du makossa" qui était une malicieuse copie de mon initiative.
Cet album, dit-on, a été en son temps piraté à grande échelle.
Eh oui, c´est ça l´autre calamité de la musique camerounaise et "La bible du makossa" en a véritablement souffert. Ce pernicieux mal contribue énormément à la déperdition de l´artiste camerounais ce d´autant plus que rien n´est fait pour le combattre. Les artistes, sur le terrain, essayent de se battre, mais ils ne sont pas soutenus par l´Etat. Ce laxisme donne libre cours aux pirates qui opèrent en toute quiétude.
Ça fait une quinzaine d´années que vous vivez en France, qu´est ce que vous y faites exactement?
Je fais de la musique en tant que professionnel, c´est d´ailleurs la raison pour laquelle j´ai décidé un jour de partir du Cameroun. Je vis exclusivement de cette musique ce qui me permet de beaucoup voyager à travers le monde dans le cadre des concerts. Depuis tout ce temps, j´ai eu l´opportunité de prêter mes talents à quelques grands noms de la musique africaine et mondiale, comme Salif Keita, Papa Wemba, Meiway… Outre ces talents, je travaille jour et nuit dans des studios en qualité d´arrangeur.
Quels sont vos nouveaux chantiers dans la musique?
En ce moment, j´ai près de soixante-dix chansons dans presque tous les rythmes du monde, jazz, funk, Rn´B, makossa… Autant de variétés, parce que je fais dorénavant de la musique professionnelle et c´est important pour moi de maîtriser les rythmes d´ailleurs. La musique, c´est un excellent moyen d´intégration. Pour être plus concret, je prépare actuellement un double album qui sortira cette année. Ca fait neuf ans que j´évolue dans l´ombre, alors que je suis un auteur-compositeur.
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