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01.06.2007

ECRANS NOIRS 2007 - Le Festival: Bassek ba Kobhio, Jean Pierre Bekolo, Cyrille Masso 

Bassek ba Kobhio : La formation : à nouveau la priorité

“Nous avons complètement été accaparés par le projet de création d’une vraie école de cinéma et nous avons négligé la formation sur le tas”.
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Nous voici à nouveau réunis à Yaoundé pour fêter le cinéma. Onze ans que ça dure, onze ans de défis permanents, mais onze ans aussi de victoires heureuses, même si parfois des raisons d’être habité pessimiste ne manquent pas. Mais quelle oeuvre humaine pourrait-elle donc être exempte d’obstacles ? Alors toujours la passion et la raison l’emportent sur l’émotion, et nous continuons ou reprenons la route sans désemparer, gonflés d’optimisme.

Le dixième anniversaire des Ecrans Noirs fut pour nous un formidable moment de joie, l’occasion d’une profusion d’encouragements multiples : ceux de cinéphiles, ceux de tous nos partenaires dont nos soutiens de la France d’ici et de Paris, ceux de la Francophonie, ceux de nos sponsors, et surtout de ceux de son Excellence Monsieur le Président de la République, accompagnés de ceux du ministre d’Etat chargé de la Culture.
Une telle manifestation d’intéressement appelle des obligations de notre part. Rien ne peut plus donc être fait comme si tout ce prestigieux monde n’était pas là, nous accompagnant de sa sollicitude, de son indulgence parfois, de sa vigilance aussi cependant.

Il nous est donc certes apparu nécessaire de renforcer les acquis, et ceci est totalement à notre portée, mais il s’impose aussi à nous d’oser, d’innover, d’inventer, et cela demande réflexion, concertation, chantiers à ouvrir. Et par exemple dans le domaine de la formation, une de nos sources de fierté, peut-être pas assez mise en avant ces deux dernières années.
Et pour cause, nous avons complètement été accaparés par le projet de création d’une vraie école de cinéma, et nous avons négligé la formation sur le tas comme on appelle aussi la formation continue, comme si les grandes batailles commandaient la mise sous boisseau de ces petites luttes quotidiennes sans lesquelles la fatalité finit par l’emporter sur l’espoir de jours meilleurs. La formation initiale requiert-elle beaucoup de préparation, beaucoup de moyens à mobiliser en même temps ? Cela est vrai et nous l’avons éprouvé. Il ne faut pas pour autant arrêter toutes les formules de formation continue que nous avions engagé il y a dix ans, pour attendre le jour où se mettra en place une école classique. Il faut continuer à former, en sélectionnant peut-être un peu plus les candidats, mais il faut former sans relâche, car c’est là la seule voie de salut pour notre cinéma si nous voulons qu’il retrouve le lustre d’il y a quelques années, si nous voulons qu’il entre dans une nouvelle ère de performance.

Cette année, nous comptons organiser trois sessions de formation, dans le scénario, la production, et le numérique. La formation sur le scénario a déjà commencé avec l’appui de l’Unesco, de l’ambassade de France et de l’Oif, qui nous permettent de renouveler une expérience heureuse d’il y a quelques années. Mais notre principal défi, c’est encore et toujours de donner à voir des films, de multiplier les opportunités d’entrer dans une salle, de s’asseoir ou de se tenir devant un écran. Et cela aussi, nous allons le continuer et l’intensifier, et d’abord avec l’opération « écrans numériques » pour laquelle nous bénéficions d’un appui déterminant de la société Orange. Nous savons que les écrans numériques ne constituent pas à eux seuls la seule solution, que nous devons trouver le moyen d’intéresser les gens à revenir dans les salles, que nous devons par conséquent œuvrer pour que ces salles demeurent ou ressuscitent, pour que le cinéma soit toujours le cinéma, avec toute sa magie. Bon festival !
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Vues : Le pécule et la pellicule
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Jean Pierre Bekolo et Cyrille Masso ont honoré le Cameroun au dernier Fespaco. Les films de ces deux réalisateurs ont remporté trois prix à Ouagadougou: le Prix spécial du jury fiction pour Cyrille Masso, l´Etalon d´argent et le prix de la meilleure interprétation féminine, pour Jean Pierre Bekolo.
Par Venant Mboua
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A leur retour au Cameroun, les Saignantes et Confidences ont été célébrés à Yaoundé, au cours d´une cérémonie solennelle organisée par le ministère de la Culture. Le représentant du ministre de la culture, à la cérémonie a dit toute la fierté du ministre de son patron, de caresser enfin une récompense du Fespaco, plus de 30 ans après l´Etalon d´or ramené par Dikongué Pipa, avec son légendaire Muna Moto.

Interrogé par les journalistes, Cyrille Masso a reconnu que le cinéma camerounais a des problèmes, dont celui de la formation. "Nous avons, disait-il, très peu de gens formés dans les différents compartiments de la production (producteurs, distributeurs), dans les métiers de la gestion de la production, de l´entreprenariat culturel dans la filière image ". L´amateurisme des professionnels camerounais est souvent évoqué pour justifier le faible niveau de financement de notre cinéma. Un peu comme en Occident, on fait très peu attention aux productions africaines, ce qui a fait dire à Jean Pierre Bekolo qu´il y a "un rejet systématique de l´Afrique à Cannes", en s´appuyant sur le fait que "parmi ses 35 réalisateurs venus du monde entier, pas un seul n´est africain".

Il est donc facile on le constate, d´organiser des prétextes sur des actions qu´on ne veut pas mener. Car toujours concernant Cannes, Jean Pierre Bekolo n´est pas du tout d´accord avec Véronique Cayla, ex-directrice générale du Festival de Cannes, aujourd´hui dirigeante du Centre National de la Cinématographie qui soutient, un brin démagogue, que "Le festival [Cannes, Ndlr]a toujours été très attentif aux pays où le cinéma a du mal à exister". Comme les hommes politiques de chez nous affirment avec emphase leur engagement pour le développement des arts en général et pour le cinéma en particulier, lorsque c´est l´occasion. Par contre, lorsque la même Véronique Cayla affirme que "dans la création, il y a inévitablement une dimension politique (…)", nous sommes tentés d´ajouter que "c´est pour cela que tous les arts sont au service du politique, y compris ceux qui sont critiques vis-à-vis de lui".

Le cinéma camerounais n´a toujours pas eu les faveurs du politique, du moins depuis la mort du Fodic (Fonds de l´industrie cinématographique) qui avait vocation de subventionner les créations camerounaises. Même après l´avènement du Compte d´affectation pour le soutien de la politique culturelle du gouvernement, chargé de gérer le volet subvention de l´action gouvernementale, on a eu du mal à voir les faveurs de l´Etat envers les hommes de cinéma. Il y a trois ans pourtant, le gouvernement a contribué au financement de quelques projets de cinéastes reconnus. Entre 7 à 10 millions étaient donnés à certains, dont Cyrille Masso et Jean-Pierre Bekolo. Ce n´était pas suffisant mais leur réussite démontre qu´en y mettant plus d´argent, le gouvernement camerounais peut assurer la promotion de notre cinéma à l´échelle internationale. Pour sa fierté et son honneur.

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Evocation : Tranches de vie d’un festival

Onze ans déjà qu’Ecrans noirs illumine le 7è art dans la ville aux 7 collines.
Justin Blaise Akono
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Le festival Ecrans Noirs du cinéma africain lève son rideau dès demain dans la ville de Yaoundé. Depuis le lancement en 1997, le festival a réalisé des tranches de vies dont les plus saillantes semblent s´être manifestées lors de la dixième édition en 2006. Comme le célèbre festival de Cannes en France, celui de Yaoundé s´est ouvert pour la première fois, avec une montée des marches du Palais des Congrès, où se sont déroulées les cérémonies d´ouverture et de clôture. "L´ouverture est devenue un moment fort, exceptionnel. Et certains Camerounais, qui rêvaient d´avoir leur festival de Cannes sont satisfaits", pense René Ayina, promoteur du Festival de Bikutsi.

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Réactions
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Nick Bomba, consultant en communication
J’ai plusieurs fois assisté au festival Ecrans Noirs, je vous assure que l’édition de l’année dernière était inédite. J’ai monté les marches sur tapis rouge on se croyait à Cannes. C’était un défi que les organisateurs ont relevé avec brio malgré la panne d’électricité qui n’a pas pu déteindre l’éclat de la cérémonie de clôture. C’est vrai que certaines autres éditions ont été particulières. C’est le cas par exemple de l’année où le film de Mobutu a été diffusé

Landry Mbassy, artiste
Tout d’abord le festival Ecrans Noirs est une bonne initiative. Je pense que l’organisation en général est assez bonne. Cependant, si on s’y met d’avantage on peut régler la légère désorganisation que l’on note au niveau du village du festival. Le site depuis la dernière édition du festival est meilleur en terme d’espace et d’emplacement, que celui des années antérieures. Si on continue à innover chaque année, je pense qu’on pourrait atteindre le festival de Cannes en France. Ecrans Noirs, c’est aussi un tremplin pour les jeunes artistes qui veulent exprimer leurs talents.

Samuel Ngue, webmaster
Depuis qu’on a instauré la montée des marches sur tapis rouge aux Ecrans Noirs, les cérémonies d’ouverture et de clôture sont devenues grandioses. Tout le monde rêve d’y assister. Malheureusement, la clôture de l’année dernière à l’occasion des 10 ans dudit festival n’a pas été une réussite à cause de la coupure d’électricité qui a duré près d’une heure. Ce qui a fait rentrer plusieurs personnes y compris moi.

Anny Engama, écrivain
Les Ecrans Noirs sont une occasion pour vulgariser et valoriser le cinéma africain. Dernièrement au festival de Cannes, il n’ y avait aucune présence africaine, ce qui est une preuve de la morbidité de notre cinéma. C’est une occasion pour créer des débouchés dans le marché de l’art audiovisuel. Je pense aussi qu’il est nécessaire de bien gérer l’après festival. Il ne faut pas qu’il y ait une rupture entre la dernière et la prochaine édition du festival. Il faut créer un lien entre les différents festivals et assurer le suivi du cinéma au fil du temps.

Pélagie Ng’ Onana, journaliste
J’ai l’impression qu’au fil des éditions il y a une nette évolution au niveau de l’organisation. Chaque année il y a des innovations. Mais je déplore que le cinéma camerounais ne soit pas assez représenté pourtant c’est un festival qui se déroule chez nous. Cette année par exemple, on dénombre moins de dix films camerounais.
Propos recueillis par E.H.E

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Pouquoi le cinéma africain est absent à Cannes ?

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Martial Nguéa
Critique de cinéma

Le film africain est de mauvaise qualité
"Le cinéma africain n´a pas les moyens de compétir au festival du film de Cannes. Ces moyens, ce sont notamment, des films de qualité. Il n´y en pratiquement pas en Afrique. Cela résulte d´une sous formation des techniciens du cinéma sur le continent. Il y a également un manque de financements de la production qui entraîne la sous-production. Conséquence, les quelques films qui sont produits ont une qualité esthétique qui laisse à désirer, comparativement à ceux présentés à un festival mondial comme celui de Cannes "

Molo Olinga
Critique de cinéma

Le cinéma africain est craint à Cannes

" L´Afrique est un terrain de concurrence pour le cinéma mondial que l´on retrouve à Cannes. Du coup les occidentaux ne sélectionnent pas des films africains au festival de Cannes, parce qu´ils ont peur de se voir ravir le marché par les Africains. Parce que nous avons des bijoux de films produits en Afrique, mais les occidentaux continuent de nous convaincre que ces films ne sont pas concurrentiels ".

Lazare Etoundi
Journaliste

Les intriques ne sont pas bonnes

" Le film africain ne répond pas encore à toutes les exigences du film commercial que l´on retrouve à Cannes. Il est généralement lent, les plans et les séquences sont exagérément longs. Mais surtout, les intrigues mettent du temps à se dénouer. Et le film africain épouse difficilement les préoccupations que l´on retrouve dans les films sélectionnés à Cannes. Nos films tournent toujours autour de banales histoires de sorcellerie, dont le public est forcement réduit "

Siméon Fotso
Directeur Cinéma Abbia

C´est le bizness des
puissances occidentales

" Cannes, c´est le festival des grosses productions provenant des grandes puissances économiques d´Europe et des Etats-Unis. Le cinéma africain n´a pas de poids parce qu´il vient d´un continent qui n´a pas de poids économique, il ne peut donc pas être présent à Cannes. Le film africain ne peut pas jouer dans la cour des grandes puissances économiques, même s´il est de bonne qualité. Et Dieu seul sait qu´il y en a en Afrique.

L´autre moment fort, qui a souvent attiré des foules, c’est le village du festival. Institué en 2005, il s´est déplacé de l´arrière du centre culturel français pour le Musée national, plus spacieux. Lieu de rencontres par excellence. Il a abrité en dehors des projections, la quasi totalité des activités du festival. "La dixième édition a connu une très grande affluence au village du festival, même s´il n´y avait pas de film sur ce site" a témoigné René Ayina avant d´ajouter que "c´était une occasion des rencontres entre professionnels". Or, l´affluence dans les salles est restée un défi des organisateurs dès la première édition en 1997. Même l´année dernière, "le cinéma théâtre Abbia n´était pas plein", a déploré Patricia Moune, la coordinatrice de l´Association Ecrans Noirs.

Le festival est d´abord une terre de cinéma, une terre des hommes de cinéma à travers présences, rencontres et formations, mais aussi une terre d´événements connexes. "Il est devenu au fil des ans, un cadre privilégié pour la diffusion et la promotion des films africains et francophones en Afrique centrale", comme l´a imaginé l´initiateur, le cinéaste Bassek Ba Kobhio à travers l´association Terre africaine et aujourd´hui, l´association Ecrans Noirs. D´ailleurs, Patricia Moune indique que "l´ambition est de garder cette troisième place à côté de nos aînés que sont le Fespaco et Carthage". Car, pour Jean-Marie Mollo Olinga, critique de cinéma, "c´est une occasion inouïe pour les Camerounais. L´une des manifestations majeures de la sous région".

Les couilles de l’élephant

Des films sont restés gravés dans la mémoire. "Les couilles de l´éléphant", film du Gabonais Bididi Koumba, avec la Franco-ivoirienne Nadège Beausson-Diagne. Film qui a fait courir les foules, "Chocolat" de Claire Denis, ainsi que "Tsotsi", du Sud-africain Gavin Hood, qui a ouvert la 10e édition des Ecrans noirs. Il y a aussi eu " Mobutu Roi du Zaïre " du Belge Thierry Michel, "Lumumba " de l´Haïtien Raoul Peck, " Sisters in law " de Florence Ayissi et Kim Longinotto, etc. Souvent, des films ont été annoncés et déprogrammés, à l´instar des " Saignantes " de Jean Pierre Bekolo, qui n´était pas encore prêt au moment où se tenait les Ecrans noirs.

Les Ecrans noirs sont également une terre des hommes. Ces grands Africains du 7è art venus au Cameroun : Sembene Ousmane, Idrissa Ouedraogo, Cheick Doukouré, Gaston Kaboré, Henri Duparc, Cheick Omar Sissoko, tout comme le réalisateur Gaston Kaboré du Burkina Faso, qui a animé le colloque qui avait pour thème: "Ecrans Noirs, noirs à l´écran, un regard sur le cinéma africain face aux défis de la mondialisation". Et, depuis 2001, des formations sont assurées pendant le festival. A l´instar des journalistes critiques de cinéma. Yvette Mbogo du magazine Cinépress confie que, "grâce à ce festival, l´association des journalistes camerounais critiques de cinéma appartient à la Fédération africaine de critique de cinéma".

Itinérant au départ avec des pays tels que la République centrafricaine et le Congo, l´événement s´est stabilisé à Yaoundé. Quelque 150 films projetés jusqu´ici et sur plusieurs sites : le cinéma Théâtre Abbia, le Centre culturel français de Yaoundé, l´Institut Goëthe, les amphithéâtres des universités de Yaoundé I et II, et la maison du parti de Nkomkana, un quartier populaire de Yaoundé, entres autres. Loin des salles sombres, le public n´a manqué aucune minute du décrochage réalisé par Radio France Internationale (Rfi) avec des journalistes célèbres tels que Juan Gomez, Alain Amobe Mevegue, Dalila Berritatne, qui ont fait des reportages en direct du festival. Principalement ce débat sur un sujet de moralité qui était alors d´actualité. Et pourtant, une grande peur avait soufflé sur le village du festival. Ce qui a fait dire à Jean Marie Mollo Olinga qu´il est "désolé que le gouvernement n´ait pas profité pour soutenir ce festival dont rêvent les pays voisins. Le ministère de la Culture constitue là une force d´inertie".
 

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