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23.11.2007

Cet enfant de NEW-BELL NKONGMONDO: MBOM EPHREM, ancien Lions Indomptables 

Photo: Lions Indomptables 1982 en Espagne. Beaucoup disent que c´est la meilleure Equipe des Lions de tous les temps.
Mbom Ephrem est accroupit extreme droite.
Credits:  Camlions.com 

Mbom Ephrem lutte contre la précarité à Nkongmondo
L’ancien défenseur latéral des Lions Indomptables, tombé dans l’oubli depuis sa retraite sportive, vivote à Nkongmondo, un quartier de Douala. Il envisage sur le tard, de se lancer dans la formation des jeunes talents pour échapper à l’oisiveté.

La barbe et les cheveux grisonnants, la peau décharnée et le visage marqué de rides profondes témoignent des ravages du temps. Mais, on devine sous le survêtement qu’il porte, un corps certes longiligne, mais toujours athlétique même si celui-ci a perdu un peu de sa robustesse.

En ce mardi matin du 20 novembre 2007, Mbom Ephrem, présente un visage plutôt affable. Il accueille avec une joie non dissimulée le reporter du Messager. Une poignée de main ferme accompagne le “ bonjour ” vigoureux lancé sur un ton badin. A Nkongmondo, son quartier natal, il se sent comme un poisson dans l’eau. D’ailleurs, retrouver sa trace ici a été un jeu d’enfant. “ Vous voulez aller chez Mbom Ephrem ? Tout droit, au niveau du tournant, c’est la maison en contrebas de la route, là où vous verrez de l’huile de moteur en vente exposée ”, avait, quelque temps auparavant, renseigné, disponible, un riverain.

C’est effectivement dans cette maison dont les travaux de finition ne sont pas encore achevés que nous avons retrouvé le “ vieux ” Lion. Installé dans un canapé au milieu de la salle de séjour en compagnie d’un homme entre deux âges qui se révèle être son “ beau père ” et d’une femme (l’épouse de celui-ci), l’ancien international n’est pas surpris. “ Je vous attendais ”, confirme-t-il, expliquant qu’il a été prévenu de la visite du journaliste par Louis Noé Mbengan, le rédacteur en chef du journal de l’Afc mis à contribution dans la “ traque ”. La conversation avec Mbom Ephrem se déroule dans un terrain “ neutre ”, un bar situé “non loin de la maison familiale. On y sera plus tranquille pour bavarder ”, assure-t-il.

Sortir de la précarité

Sur sa vie actuelle, le joueur semble cultiver une grande discrétion. Sur l’insistance du journaliste, il consent néanmoins à lâcher quelques bribes d’informations, comme à regret. “ Depuis 5 mois, j’assure les fonctions de directeur technique (Dtn) et manager de l’école de football Franck Rohliceck. C’est un centre de formation mixte qui comprend pour le moment deux catégories : les minimes et les cadets. A raison de deux séances d’entraînements hebdomadaires, cela me permet de m’occuper ”.
C’est que depuis l’arrêt de sa carrière de joueur en 1989, l’ancien international peine à trouver une activité de reconversion stable. “ Nous n’y étions pas préparé. Et après, personnellement, j’ai éprouvé de la pudeur, étant naturellement plutôt réservé, à quémander quoi que ce soit. Mais il faut aussi savoir qu’à notre époque, l’honneur et le plaisir passaient avant le gain ”. En dehors de son travail actuel de formateur, Mbom Ephrem avoue vivre d’expédients et de la générosité de quelques amis qui lui trouvent “ de petites taches occasionnelles ci et là ”.

Depuis l’année dernière, il tente de mettre fin à cette précarité. En compagnie d’autres anciennes gloires de l’équipe nationale, il participe à deux stages d’entraîneur. La première, initiée par la Dtn se déroule en octobre 2006. La seconde, sous la houlette de Roger Milla avec le soutien de la Fifa (Futuro III) se tient en décembre de la même année. Ces deux sessions de formation sont couronnées par l’obtention du diplôme “ d’éducateur de 1er, 2ème et 3è degrés ”. Nanti de ce parchemin, Mbom Ephrem est impatient de mettre ses nouvelles connaissances au service du football camerounais, notamment dans la prospection des jeunes talents du football à travers le pays.

Retour d’ascenseur

Mais les autorités tardent à réaliser leurs promesses dans ce sens, regrette-t-il. En attendant leur hypothétique concrétisation, l’ancien latéral gauche des Lions Indomptables vise un autre stage de formation qui lui permettrait d’accéder à la licence de 1er degré, espérant qu’avec ce parchemin, il pourrait “ décrocher ” un job “ plus intéressant ” lui permettant non seulement de “ vivre décemment ”, mais surtout de “ sortir de l’anonymat ” dans lequel il est confiné depuis sa retraite sportive en 1989. Invité de la Fécafoot le 27 octobre dernier lors du lancement de la saison du football jeunes, le Lion a goûté de nouveau à la griserie d’une notoriété retrouvée, le temps d’un week-end. “ On a été présenté au public et notamment aux jeunes talents qui veulent suivre le chemin du football ”, se satisfait-il.
“ C’est une bonne initiative. Elle est venue nous rappeler à la mémoire collective nationale. Aujourd’hui, il n’y en a que pour les Eto’o. C’est normal, mais il ne faut pas oublier que c’est grâce à nous qu’ils sont là ; car à une époque, nous avons nous aussi porté les rêves intimes de plusieurs milliers de Camerounais, permettant ainsi à notre football de se régénérer. Il est donc légitime que nous demandions aujourd’hui un retour d’ascenseur ”, plaide-t-il, d’une voix nostalgique. Moment idéal pour opérer la transition et évoquer son parcours.

Drame

Celui-ci débute en 1973 avec Rail football club de Douala. Jusque-là attaquant, Mbom Ephrem est repositionné au milieu de terrain. Deux ans plus tard, sa carrière prend une orientation définitive. Passé au Léopard de Douala (voir palmarès ci-contre), le joueur descend encore d’un cran sur le flanc gauche de la défense. Il y évolue jusqu’à sa retraite en 1989. Un épisode douloureux qu’il évoque avec un pincement au cœur. “ Nous étions à la veille de la Can 1984. A un mois de l’échéance, je suis victime d’un accident de circulation ”, se rappelle-t-il. Ce drame aura des conséquences graves sur la carrière du joueur. Il le prive d’un titre continental puisque Mbom Ephrem ne participera pas à la campagne victorieuse de Côte d’Ivoire avec la sélection nationale. En outre, la blessure signe l’arrêt précoce de sa carrière internationale.

Malgré le palmarès vierge, les quatre (04) ans de bail effectué au sein des Lions Indomptables sont intenses et riches. Ils culminent avec la coupe d’Afrique des nations et la coupe du monde (la première du Cameroun) disputée en 1982, “ deux moments forts ”, apprécie aujourd’hui encore Mbom Ephrem. “ La participation à la coupe du monde représente le rêve de tout joueur, une sorte d’apogée quoi. Personnellement, j’ai ressenti la mise en valeur du joueur que j’étais. Elle m’a procuré une émotion rare. Je me suis senti pousser des ailes ”, poursuit-il. Il parle avec une égale émotion de la campagne libyenne ayant précédé la coupe du monde espagnole.

As Bilima

“ En Libye, nous étions handicapés par le terrain. Nous avons dû évoluer sur une pelouse synthétique. Cela nous a causé un véritable préjudice. Les gros gabarits que nous étions ont eu du mal à s’adapter à cette nouvelle donne. Nous avons néanmoins réalisé un bon parcours. Comme peu après lors de la coupe du monde, nous sortons invaincus du tournoi, même si c’est au premier tour ”. Si les deux compétitions sont les meilleurs souvenirs de Mbom Ephrem avec les Lions Indomptables, son palmarès en club est plus étoffé. Mais la coupe des clubs champions (ancêtre de l’actuelle Caf champion’s league, Ndlr), remportée de haute lutte en 1980 face à As Bilima, au stade hostile du 20 mai de Kinshasa, figure en tête des titres les plus revendiqués du défenseur.

“ Le fait est que, psychologiquement, nos adversaires voulaient nous frustrer. Ils nous ont par exemple logés dans un hôtel en plein centre ville où il était pratiquement impossible de trouver le sommeil à cause du bruit environnant. Nous avons dû recourir aux services de l’ambassadeur du Cameroun à Kinshasa pour trouver un cadre plus décent. Le jour du match, les organisateurs ont fait entourer le terrain par des nains tout de rose vêtus. Et ils ont voulu interdire l’accès de notre bus au stade pour nous obliger à y aller à pied, ce à quoi nous nous sommes opposés ”, se souvient-il. “ Cette rencontre demeure mon meilleur souvenir en club. Pourquoi ? Après le nul concédé à l’aller (2-2) à Garoua, on avait le dos au mur et pour dire vrai, personne n’y croyait plus ”, explique Mbom Ephrem.

Frustration et espoirs

Tancés par Ahmadou Ahidjo, ancien président du Cameroun et “ fervent supporter ” de Canon de Yaoundé et blessés dans leur orgueil par les manœuvres des Zaïrois, Théophile Abéga et ses coéquipiers se surpassent et déjouent tous les pronostics. Score final, 3-0 en faveur de Canon de Yaoundé. Pour saluer l’exploit, “ le président décore le club d’une médaille de Commandeur de l’ordre de la valeur et certains joueurs parmi lesquels moi, Chevalier de l’ordre de la valeur ”. Droitier positionné sur le flanc gauche, Mbom Ephrem, latéral élégant et technique, est sans doute l’un des précurseurs des défenseurs dits modernes d’aujourd’hui. Cette plus value n’échappe pas à Ridanovic et Jean Vincent, les deux entraîneurs qui l’ont marqué. “ Le Yougoslave m’a apporté un plus au niveau du travail physique et le sens tactique. Quant au Français, il m’a donné une plus grande confiance en mes capacités ”, dit-il.

Joueur talentueux sorti du terrain sur un mauvais concours de circonstance, la carrière de Mbom Ephrem s’est achevée sur une frustration. Celle de n’avoir pas connu l’expérience professionnelle. Philosophe, le joueur préfère y trouver des circonstances atténuantes. “ C’était pas facile, ce qu’ils appellent aujourd’hui filière africaine n’existait pas vraiment. Les Européens de manière globale snobaient encore les joueurs issus du continent noir à quelques exceptions près. Sion ils préféraient les attaquants. C’était donc plus difficile pour nous les défenseurs ”. Les subsides tirés de la vente de son talent auraient été d’un grand apport dans l’éducation de ses trois enfants basés à Yaoundé. C’est aujourd’hui son plus grand souci. Mais dans le secret de son cœur, il espère que Eounè Mbom Dagobert Yannick, le cadet de ses trois enfants (dont une fille) qui suit ses pas dans le football, réparera rapidement le tort en accédant à une carrière pro. Un juste retour des choses. Mais Mbom Ephrem n’en fait pas une fixation. “ Je laisse leur liberté à mes enfants. Quand je jouais, personne ne voulait que je joue ”, justifie-t-il. Propos guidés par la prudence d’un monde où les revers font partie du quotidien ? Sans doute.

biographie
Né le 18 juillet 1954
Père de trois (03) enfants (dont une fille)
Poste : défenseur latéral
Carrière sportive (1973-1989)

Rail Fc de Douala (1973)
Eclair de Douala (1974)
Léoprad de Douala (1975-1977)
Canon de Yaoundé (1978-1986)
Dragon de Yaoundé (1987)
Rail Fc (1988)
Canon de Yaoundé (1989)

Palmarès (Principaux titres)
Can (1982, sorti au 1er tour)
Coupe du monde (1982, 1ère participation du Cameroun, sorti au 1er tour)
Coupe des clubs champions (1980, Canon de Yaoundé)
Coupe des coupes (1979, Canon de Yaoundé)
Coupe des clubs champions (1978, Canon de Yaoundé)

Par Frédéric BOUNGOU
Le 23-11-2007

 

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