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Francois Sengat Kuo


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Lettre de François Sengat Kuo à Louis-Marie Pouka

 
Salut cordial et fraternel. Source : R. Philombe, Le Livre camerounais et ses auteurs. publié le 08/12/2004


Cher frère et ami

La curiosité intellectuelle n’est point le défaut ordinaire des Camerounais. C’est avec une très grande joie que je la découvre en toi. Aussi mettrai-je beaucoup d’enthousiasme à t’éclairer (de mon mieux, cela va sans dire) sur le difficile problème que soulève ta dernière lettre.

« Il s’agit, si j’ai bien compris, de définir ce que ce sera la littérature camerounaise de demain ? En somme, tu me demande de jouer un peu le rôle de prophète, n’est-ce pas ? Je préfère avouer tout de suite que ce rôle est au dessus de moi et qu’il m’est absolument impossible de résoudre le problème ainsi posé. La méthode de penser qui est la mienne ne me permet donc pas des assertions hasardeuses. Toute ma contribution se limitera donc, volontairement à fournir quelques indications rapides et brèves qui, je l’espère, aideront ou pourront aider à la solution future de la très intéressante question qui t’occupe actuellement.

« Cette mise au point était nécessaire car je crois fermement pour ma part, qu’une grande honnêteté intellectuelle doit présider à nos échanges de vues. Il ne saurait être utile de parler savamment de ce qu’on ignore ou d’affronter témérairement un problème qu’on se sait pertinemment incapable de résoudre. N’est-ce pas regrettable, cher ami, que ce soit pourtant là une des manies les plus invétérées d’un nombre d’entre nous ? Je pense qu’il n’est pas toujours mauvais de toucher la plaie du doigt.

« Ceci dit, revenons à nos moutons, nous pouvons envisager, pour faciliter nos prochaines confrontations, la future poésie Camerounaise(160) à un double point de vue, à savoir celui du fond et celui de la forme.

« Au point de vue du fond, le problème me semble relativement simple. Nul doute que notre poésie doit suivre la voie qu’a tracé la poésie nègre en général, le plus grand poète noir Aimé Césaire. Elle sera dans une très large mesure, une poésie de combat, exprimant nos joies et nos peines, nos haines et nos amours, nos défaites et nos victoires, nos déceptions et nos espérances. Dans la conjoncture actuelle, notre jeune poésie sera « engagée » ou ne sera pas du tout.

« Elle sera engagée parce que le poète dans le monde moderne, n’est plus un parasite, un rossignol qui chante pour chanter, un valet qui doit distraire les grands de la terre ou chanter leurs loisirs. Aujourd’hui le poète a une mission sociale, une très grande mission à remplir : éclairer les masses et les conduire à la lumière de son phare. Il doit nécessairement avoir une mission, précisément cette mission, puisqu’il ne peut plus, qu’il n’a jamais pu, rester en marge de la société. Son devoir historique a toujours été, consciemment ou non, de se mettre à l’avant-garde des masses et de parler la « langue » des convictions de son milieu social. Maintenant, il faut que ce devoir devienne pleinement conscient. C’est là un impératif inévitable. Nos griots ont eu leur temps comme Lamartine a eu le sien. Il me semble toutefois, qu’il faille clore la page des louanges, des légendes et des chants d’amour et qu’il faille en ouvrir une autre, celle des éclats de voix, des colères inassouvies, des enthousiasmes, des exhortations, celle du bon combat. S’il ne tenait qu’à moi de le faire, je brûlerai Les Nuits de Musset » mais je conserverai « Les Châtiments » de Hugo. Le poète-troubadour est bien mort, ou doit en tout cas mourir, le poète- mage ne fait que naître.

« Le problème de la forme est autrement plus délicat. Je n’apporterai pas, cher ami, grand chose dans ce domaine. Le contenu même, c’est-à-dire le fond, détermine en grande partie sa forme. Il y a là exemple typique de rapports dialectiques, que je me bornerai seulement à signaler. Dans cet ordre d’idées, telle est du moins mon opinion, il suffira au futur poète Camerounais d’exprimer « totalement » le contenu de l’âme Camerounaise de son temps, de son époque, pour trouver du même coup, une forme typique Camerounaise. Autrement dit, le réalisme et la condition essentielle, primordiale et nécessaire d’une forme authentique.

« Mais comment me diras-tu saisir l’âme camerounaise dans la totalité à travers toutes les déformations dues aux « néfastes » influences européennes ? Avec un peu de bonne volonté, de patience et de sens critique, en étudiant notre folklore si éminemment riche. Contes, fables, proverbes, chants, danses initiatiques, arts, autant de mines d’or inépuisables de notre culture, autant de pans de notre âme mis à nu, dévoilés, livrés à notre culture, autant de possibilités de nous connaître, de nous situer dans le monde moderne. Ces futurs poètes du Cameroun se doivent de les connaître, de les interroger longuement et profondément. C’est certainement à travers eux, et uniquement à travers eux qu’ils trouveront la forme à la fois originale et authentique de notre future poésie. Il faudra cependant veiller à ce que les formes et les rythmes ainsi tirés de l’étude de notre folklore ne se sclérosent pas. La réadaptation au contenu actuel est une nécessité absolue.

« Est-ce à dire que j’exclus sans réserve les emprunts formels aux apports étrangers, souvent très riches ? Non, je crois malgré tout ce qu’on ne peut emprunter qu’en fonction de ce qu’on possède. C’est là une question grave car elle pose le problème de la culture dans les pays dépendants. Je serai très heureux de la discussion plus tard avec toi, si tu le veux bien. Pour le moment, il ne faut insister que sur ce qui nous appartient. Nous avons trop souvent tendance à négliger notre patrimoine folklorique comme sans intérêt, pour ne pas souligner ici avec force, le danger que compte pareille attitude. En effet, comment être nous-même si nous ignorons ce que nous sommes ? Comment nous distinguer des autres si nous savons mieux ce qu’ils sont et veulent que nous soyons, que ce que nous sommes nous-même ?

« Tel est à mon avis, tout le drame de la future poésie camerounaise et de la poésie et de l’art africain en général. Une seule solution adéquate.
Tel est, à mon avis tout le drame de la future poésie camerounaise et en somme de la poésie et de l’art africain en général. Une seule solution adéquate consiste à « nous retremper à la source féconde de nos folklores en un mot : nous retrouver à travers les manifestations culturelles plus authentiques de notre sol natal » Mais j’ignore ce que sera la littérature d’un Louis-Marie Pouka.

Il est cependant certain qu’elle suscite peu d’émotion dans l’âme d’un Nègre qui se veut nègre pleinement, sans réserve, parce qu’elle n’a rien d’Africain. Il n’est malheureusement pas le seul dans ce cas décevant. J’ai lu dernièrement dans le journal « Cameroun Espoir »et sous la rubrique pompeusement intitulée « Le Coin des poètes »un certain nombre de poètes qui m’ont fait vraiment sourire. (C’est là tout le mérite). Romantisme. Mais quel romantisme ? Le plus plat, le plus fade qui montre à quelle école leurs auteurs se sont inscrits. Etre romantique à l’époque de la puissance atomique, à l’heure où quelque héros bien connu lutte pour l’indépendance de notre culture. Buvez ! Ne nous rasassiez point, c’est à ce prix là que l’originalité peut s’acquérir. Est-il encore besoin d’ajouter cette vérité banale que l’arbre ne peut croître qu’en enfonçant ses racines, et plus profondément possible, dans la terre nourricière ?

Cher frère et ami, je ne dissimule pas le caractère incomplet et provisoire de ces quelques suggestions que je viens de formuler à ton intention. Je crois cependant avoir fait de mon mieux pour t’aider à résoudre ton problème poétique, à donner un commencement de solution. Je reste à ta disposition et dans la mesure de nos compétences, soit pour un renseignement complémentaire, soit pour tout autre problème.

Salut cordial et fraternel.

Source : R. Philombe, Le Livre camerounais et ses auteurs  


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